Au fil de
trois décennies consécutives, les Américains n’ont pas vu que la plus grande
évolution stratégique n’était pas la fin du monde bipolaire, mais la fin du
monopole Occidentale sur la puissance.
Si la
politique étrangère de W. Bush a été avant tout une réaction aux attentas du 11
septembre 2001, on peut dire que celle de Obama a été une réaction à cette
réaction. Obama a considéré que l’Amérique avait fait fausse
route et qu’il fallait donc tourner la page de l’interventionnisme tous azimuts
qui a marqué la politique étrangère Américaine depuis la fin de la guerre
froide. Le président démocrate a
également voulu remettre à l’honneur la diplomatie et plus largement le soft
power des Etats-Unis, afin de retrouver la capacité d’attraction du modèle Américain. Pour autant, la rupture avec Obama a été
moins radicale qu’il n’y parait. L’Amérique n’a pas cessé d’intervenir
militairement dans le monde, mais elle le fait de manière plus discrète, D'où les interrogations récurrentes sur la
politique étrangère Américaine actuelle : s’agit-il d’un repli, d’un
désengagement de l’Amérique, ou simplement d’une hégémonie en marche et trop
discrète ? Au-delà, Trump cherche à transformer par la diplomatie les
relations de l’Amérique avec le reste du
monde, du pivot vers l’Asie à une possible réconciliation avec l’Iran, avec un
succès mitigé. A-t-on déjà basculé dans
un monde post-Américain, post-Atlantique, voire Asiatique ? La question
mérite d’être posée, puisqu’elle est indissociable de l’interrogation sur la place
des Etats-Unis sur la scène internationale et leur rôle dans le monde. Elle doit tenir compte de la
résilience des Etats-Unis, de la multiplicité de leurs atouts et des attributs
de leur puissance. Elle implique également de s’interroger sur la nature du
face- à face annoncé entre les Etats-Unis et la future superpuissance Chinoise,
et surtout sur l’évolution du rôle des Américains sur la scène internationale.
TRUMP ET L'HÉGÉMONIE DISCRÈTE
Le
président Donald et sont équipe étrangère qui arrive au pouvoir, considère les
guerres des années deux mille en Irak et en Afghanistan comme des erreurs
stratégiques majeurs, et sa priorité va être d’y mettre fin. Les Américains
attendent par ailleurs du président qu’il redonne la priorité aux questions
intérieures, en particulier économiques. Autre illustration de cette priorité à
la discrétion : l’opération en Libye, ou pour la première fois les
Américains participent à une intervention multilatérale sans assurer le
leadership. Au Mali, la CIA provoque un
coup d’Etat déstabilisant toute la région et laisse les alliés et partenaires
de l’OTAN (Français en tête) finir le reste. En ce sens, la géopolitique du
pétrole Africain devient une
préoccupation croissante pour Washington et nouveau terrain de bataille face à la chine qui détient 30%, la France
36,4, l’Inde 20% et les Etats-Unis 20%, tout en écartant le sort des
populations pris en otages par des régimes corrompus comme au Nigéria, le
Niger, le Congo, la Libye, les monarchies arabes, le Venezuela, le Burkina-Faso, la Mauritanie, le Tchad, sans
oublier la manne Subsaharienne qui
dépassera les réserves Russes d’ici 2040. Actuellement le continent Africain est dominé
par des opprimés et des oppresseurs et le pétrole est devenu un « Satan
avec ses Dévots et un culte ».
L’expression leading from behind », le leadership « par l'arriere » ou en retrait, symbolise cette innovation. La formule propose
une définition différente du leadership, qui exprime deux idées
sous-jacentes : le déclin relatif de la puissance Américaine, et le fait
que les États-Unis sont indésirables dans de nombreuses parties du monde
surtout sous le règne de Trump. Cette
obsession du président Américain pour une présence plus discrète a une autre
motivation essentielle, nous donne la face cachée d’une dette abyssale et en
particulier le coût des interventions extérieures. Le président américain a
surtout cherché à transformer la relation des Etats-Unis avec le reste du monde,
et tout particulièrement avec le Moyen-Orient, l’Europe et l’Asie. Il s’agit d’adapter la posture et
l’engagement international américain à un monde en pleine recomposition, voire
un monde post-américain.
LE PIVOT
VERS L’ASIE/ UN AUTRE HARD POWER STRATÉGIQUE
Pour
Trump, l’Amérique reste une puissance du Pacifique, et il est temps qu’elle se
préoccupe de l’évolution majeure des deux dernières décennies : le
déplacement du centre de gravité mondial vers l’Asie, d’où cette expression de
« pivot vers l’Asie-Pacifique » pour exprimer la nouvelle direction
de la politique étrangère américaine.
Sous-jacent dans ce propos, le principal défi pour les Etats-Unis
aujourd’hui semble être de savoir comment gérer au mieux de leurs intérêts
l’ascension des nouvelles puissances qui s’affirment, conséquence de leur poids
économique croissant, sur la scène internationale, a commencé par la
Chine. Pour les analystes de la maison
blanche, ce défi suppose un choix, entre coopter ou contester, voire empécher
cette ascension. Dans cette vision
hautement stratégique, un conflit avec la Chine serait inévitable. Sur un autre
oncle géopolitique, le monde est passé d’une bipolarité internationale à une
unipolarité, sans pour autant s’apercevoir qu’on est fixé dans un monde globalisé
avec au moins 60 pays émergents, en claire un monde en voie de multipolarisation.
En ce sens, Trump a d’abord cherché à
faire de la Chine un partenaire responsable afin de gérer le monde, mais Pékin
adopte une tonalité plus nationaliste dans ses discours et une posture plus
agressive dans un environnement immédiat, en particulier face au Japon autour
des iles Senkaku/ Diaoyu, mais aussi face aux Philippines ou au Vietnam. Le pivot américain prend alors une dimension
militaire, officialisée dans les documents stratégiques du Pentagone. Ce
rééquilibrage stratégique doit se traduire par un repositionnement des forces
américaines de l’Atlantique vers le Pacifique et par de nouvelles priorités en
termes d’acquisitions et de recherche et développement au Pentagone.
ETATS-UNIS/
MOYEN-ORIENT : APPROCHE D'ÉQUILIBRE A DISTANCE OU RUPTURE
Le
dernier signe a bien sur été l’accord intermédiaire signé sur le nucléaire
Iranien, ennemi de trente cinq ans, ce dégel entre les deux pays a le potentiel
de remodeler la carte géopolitique de la région. Cette stratégie se traduit par
une mise à distance et par l’acceptation par Washington d’une plus grande
volatilité dans la région. Selon Trump, les Etats-Unis reconnaissaient que leur
influence était limitée, et que l’évolution interne des monarchies ainsi que
l’augmentation des tensions religieuses entre chiites-sunnites ne pouvaient
être réglées par des interventions extérieures.
Il affirmait ainsi qu’il n’était plus question d’engagement militaire
américain direct comparable aux
décennies passées, et la gestion de la guerre en Syrie par Washington en
est la meilleure preuve. C’est bien aussi le sens premier de la priorité donnée
à un rapprochement américano-iranien, puisque c’est en Iran que les Etats-Unis
couraient le plus grand risque immédiat de se retrouver embarqués avec
Israël dans une nouvelle intervention
militaire au Moyen-Orient. Plus largement, le retrait relatif des Américains du
Moyen-Orient clôt une période ouverte en 1991 (guerre du Golfe) et signe le
retour à une approche plus traditionnelle d’équilibre à distance. De même, les efforts sur le processus de paix
doivent être compris comme une tentative de désamorcer des tensions qui empêchent
d’autres réalignements potentiels, notamment entre Israël et certaines
monarchies du Golfe aux intérêts stratégiques convergents, à commencer par
l’Arabie-Saoudite. Pour Trump, il y a
donc surtout la volonté de clore la période des engagements directs et massifs,
mais aussi de se concentrer ailleurs.
Face a ses ruptures stratégiques
fortement humiliantes, la
monarchie des El-Saouds se sont retrouvés dans les bras de la Chine afin
d’acquérir son propre arsenal nucléaire par-rapport à l’Iran et Israël.
DÉFENSE AMÉRICAINE ET
REDÉFINITIONS TRANSATLANTIQUES
La
défense américaine reste à la pointe de la dernière révolution dans les
affaires militaires, en particulier dans le domaine de la robotisation de la
guerre, dont les drones constituent l’exemple le plus répondue. Le Pentagone disposait d’un total de
10 967 drones toutes catégories confondues. De 8332 Raven « drone lancé à la
main » à 115 Reaper ou 35 Global Hawk, le top du drone aujourd’hui.
Au-delà du budget et de l’avance technologique, la puissance militaire américaine
bénéficie aussi de l’empreinte globale des américains, symbolisée par
l’organisation en commandements militaires régionaux couvrant l’ensemble du
globe. Sur les 1,6 millions de soldats américains, prés de 500 000 étaient
en 2011 déployés à l’étranger dans 148 pays différents. Ils disposent également d’un réseau de bases
qui couvre le monde entier : Washington dispose toujours d’un réseau
d’alliances inégalé, structuré notamment autour de l’OTAN, avec des pays
associés et de multiples formes de partenariat, de l’Europe à l’Asie en passant
par le Golfe. Les Etats-Unis ont plus de 50 alliés formels. La relation
transatlantique, a évolué sous Trump. Sommets boudés, modalités choisies en
Libye, au début du premier mandat, l’Europe a semblé faire les frais du pivot
vers l’Asie et d’un certain détachement de la part de Trump. Il s’agissait
surtout pour le président de faire comprendre aux européens que pour Washington
la page de la guerre froide était tournée, et que les européens devaient
désormais prendre en charge leur sécurité. Au fil du temps, l’annexion de la
Crimée par Poutine vient remettre en question cette évolution : elle
replace au centre du débat la question de l’importance de l’Europe pour les
Etats-Unis et réciproquement. La réponse
apportée par la maison blanche à cette question sera donc déterminante et même la France et l’Allemagne rentrent dans les rangs de l'OTAN
LE MONDE
DE DEMAIN ET LE RÔLE DES ETATS-UNIS
La
question d’une nouvelle bipolarité entre la chine et les Etats-Unis reste
prématurée. La puissance de la chine
vis-à vis de l’Amérique est pour l’instant plus économique que militaire, par
le poids croissant de la chine dans l’économie mondiale et par le montant de la
dette américaine détenue par les chinois (1200 milliards de dollar, soit un peu
plus du quart de la dette extérieure totale des américains). C’est bien ce pouvoir économique qui permet à
Pékin de ne pas se laisser intimider par la puissance militaire américaine.
Pour l’instant, Pékin se montre réticent à prendre en charge les
responsabilités globales que Washington dit vouloir lui confier, qu’il s’agisse
de gestion multilatérale des crises, en Asie ou ailleurs.
La
multiplicité des pôles de puissance constitue sans doute le principal défi du
monde actuel, qu’il soit ou non déjà post-américain. Plus il y a d’acteurs, et
plus le consensus global et les possibilités d’action collective diminuent. Ce
qu’on observe déjà, force est de constater également le retour de la paralysie
du Conseil de sécurité de l’ONU, avec les positions souverainistes défendus par
la Russie et la Chine, auxquelles sont également sensibles des puissances
émergentes comme le Brésil, l’Inde ou encore l’Afrique du Sud.
S’agit-il
d’une évolution attendue dans un cycle connu de la politique étrangère
américaine avec ses alternances d’extraversion et de repli ? Ou d’une
véritable rupture marquant la fin d’une époque, voire d’un certain modèle
américain fait de la conviction d’une vocation messianique, celle d’être le
seul pays poursuivant la paix mondiale pour ses intérêts, mais pas seulement ?
La question se pose aussi aux américains, mais quelle que soit la réponse, elle a des
conséquences pour le reste du monde.
Allons-nous vers une troisième guerre mondiale ? La question aussi
reste posée ?
MOHAMMED
CHERIF BOUHOUYA
Le
politologue américain Joseph Ney a bien caractérisé en peu de mots notre
réalité, son caractère inédit dans l’histoire et la difficulté qui en résulte.
(La
politique internationale aujourd’hui ressemble à un jeu d’échecs en trois
dimensions. Au sommet se trouve la dimension militaire, et sa répartition
mondiale est encore unipolaire « suprématie américaine » ; au
milieu, les relations économiques inter- étatiques : il s’agit d’un monde
multipolaire, et c’est le cas depuis presque deux décennies ; en bas, le
monde des acteurs transnationaux et des grandes questions transnationales, du
changement climatique aux trafics en tous genres et au terrorisme : la
puissance es distribuée de manière diffuse et les acteurs non étatiques règnent
le plus souvent).
A mon
avis, les fractures entre activistes et isolationnistes traversent les deux
partis, républicain et démocrate, mais aujourd’hui les partisans d’un certain
désengagement semblent avoir le vent en poupe. Le congrès américains est
presque structurellement isolationniste ou en tout cas porté à l’aventurisme
extérieur, et cette caractéristique est renfoncée par des sondages traduisant
la prégnance de ce sentiment dans l’électorat américain, ce qui explique que Donald Trump ne serait pas
réélu pour un deuxième mandat et les démocrates vont nous plonger vers un
nouvel ordre mondial.
Le monde devient très clair tant sur le plan géopolitique que sur l'échiquier géostratégique. On voit qu'il y a un émiettement, une fragmentation des puissances et donc une donc une fragmentation, un émiettement et une diversification de la conflictualité. On est donc passé à des guerres ( infra-intra étatique). La situation du monde, est rentrer beaucoup plus dans des guerres civiles internationalisées que des guerres entre Etats, forme classique des conflits.
RépondreSupprimerCette vision globe sur le monde, est partager par plusieurs analystes Américains et Français. Parmi Les plus célèbres, ont peut cité Pascale Boniface, directeur de l'IRIS, le politologue Américain Joseph Ney, et surtout le feu Jean Christophe Victor.
RépondreSupprimer