samedi 10 décembre 2022

 GEOSTRATEGIE/ ATLANTIQUE NORD : ENTRE DOMINATION GLOBALE OTANIEN ET DÉFIS

Depuis 2022, l’OTAN mène la phase d’exécution ( NESH22) du projet Neptune. Les activités de surveillance se sont déroulées en mer Baltique, avant de rejoindre la mer Adriatique et la mer Méditerranée. Les principales bases navales européennes autour de la mer Baltique sont la Suède, la Finlande, le Danemark, l’Allemagne, le Pologne, Lituanie, la Lettonie, l’Estonie et les États-Unis. Ces derniers confirment leur prééminence stratégiques autour de la Baltique, de l’Atlantique nord et de l’océan glacial Arctique.


Les États-Unis ont fait de cet espace géostratégique une priorité de leur politique de sécurité pour les années 2020/ 2030, montrant qu’ils souhaitaient s’opposer à leurs rivaux potentiels dans la région, Chine ou Russie, y compris par l’usage de moyens militaires très conséquents. Pour l’OTAN, se sont les équilibres géopolitiques du Nord de l’Europe, qui volent en éclat et qui obligent à repenser les normes géostratégiques futurs en Atlantique nord en général et en mer Baltique en particulier. A rebours de ses objectifs de guerre supposés, la Russie doit faire face à un élargissement majeur de l’OTAN qui ne fait qu’aggraver son enclavement relatif en mer Baltique. Pour Poutine, ces adhésions ne constituaient pas une menace en soi, mais que la Russie réagirait à des déploiements militaires, sans préciser la nature et l’ampleur de ses éventuelles réactions. La présence des forces navales russes avait montré à quel point sa puissance naval devait être relativisée. L a vétusté et le nombre limité de bâtiments opérationnels ne permettaient pas de conclure à l’existance d’une menace, immédiate de la Russie sur la sécurité des États membres de l’Alliance atlantique et leurs voies d’approvisionnement commerciales, malgré une volonté russe de revenir dans la stratégie des programmes de sous-marins. En 2021, le lancement du sous-marin nucléaire Kazan, inaugurant la nouvelle classe de SNLE ( sous-marin nucléaire Lanceurs d’engins, et Yasen-M de la marine russe projet 885M), intégré à la flotte arctique basée à Severomorsk, n’a pas eu pour conséquence d’entraîner le moindre basculement des grands équilibres stratégiques en faveur de la Russie. De fait, la présentation des armements russes embarqués sur le Kazan, avec le Zircon 3M22, un missile hypersonique supposé évoluer jusqu’à sa cible entre Mach 6 et 8, actuellement testé et réputé dangereux du fait qu’il pourrait réorienter sa trajectoire et se rendre impossible à intercepter, les missiles de croisière Oniks ( SS-Né- Strobile) et Kalibr ( SS-N27-Sizzler), pourrait laisser accroître que la Russie dispose d’atouts maîtres dans son jeu géopolitique avec l’OTAN. En revanche, le réel déséquilibre des forces entre la Russie et l’OTAN n’a fait que s’amplifier depuis trois décennies et la guerre en Ukraine a simplement permis d’acter le déclassement de la Russie comme puissance naval majeure. Les désastres successifs vécus par la flotte russe en mer noire n’ont fait qu’ajouter à la mauvaise impression générale qui entoure les capacités navales russes. Le navire amiral de la flotte russe en mer Noire, le croiseur Moskva, a été gravement endommagé le 13 avril 2022 et à coulé. Ce navire, dont la construction a débuté en 1976, était en fait obsolète et a montré son incapacité à résister aux tirs des missiles les plus modernes. Néanmoins, la Russie dispose de capacités basées dans la péninsule de Kola et en mer Baltique. Ces forces restent significatives et dotées de l’arme nucléaire. Ce qui représente une menace existentielle, même pour la Suède ou la Finlande, est probablement faire preuve d’une certaine exagération, tant les moyens dont disposent les pays de l’OTAN permettraient d’arrêter, certes avec des pertes réelles, une attaque russe de type conventionnel. Pour autant, il ne faut jamais écarter la question d’une attaque russe avec des armes nucléaires tactiques, qui bouleversait à coup sûr la fin de notre existence.

LES NOUVEAUX DÉFIS DANS LES RÉGIONS ARCTIQUES ET BALTIQUES
Aux enjeux géopolitiques se sont ajoutés d’autres défis militaires, politiques, environnementaux, énergétiques, miniers de première importance qui n’ont fait que tendre les relations entre États extérieurs à la région comme la Chine. La hausse de la demande mondiale pour les matières premières a contribué à faire de ces régions arctiques et nord-européennes un nouveau poole d’attractivité pour le grand jeu de la quête aux ressources; bien que les conditions d’extractions d’exploitation des ressources se heurtent à certaines réalités climatiques et physiques, comme la difficulté d’exploiter en offshore des ressources qui se trouvent dans des mers peu propices à une exploitation économique classique. La mer Baltique, est aussi un espace restreint que se concentrent les plus grands risques géopolitiques à caractère économique. Les défis géoéconomiques de la région reste les gazoducs NordStream 1 et 2. Cette nouvelle conduite sous-marine devait disposer d’une capacité de 55 milliards de mètres cubes pour un coût estimé à 8 milliards d’euros, financés pour moitié par Gazprom et par cinq compagnies européennes, chacune apportant 950 millions d’euros. A son arrivée, le gaz devait être comprimé à 200 bars avant son acheminement vers le marché européen. Gazprom avait ainsi pu répondre à la demande croissante de gaz en Europe, évaluée à 120 milliards de mètres cubes supplémentaires en 2035 avant la guerre en Ukraine. Pour les régions nord-atlantiques et arctiques, les questions qui se posent sont à la fois d’ordres économiques et stratégiques. Avec la hausse mondiale des besoins en matières premières et les changements climatiques en cours, cette région du globe fait l’objet d’un intérêt renouvelé de ses riverains et d’une fragilisation environnementale croissante. Ainsi, en 2007, la Russie est parvenue à déposer un drapeau au fond de l’océan Arctique, à plus de 4000 mètres de profondeur, exactement à la croisée des espaces maritimes revendiqués par le Danemark, la Norvège, le Canada et les États-Unis. La France n’est pas absente de cet étrange concours de conflictualité militaire ou économique; dont elle a présenté le 5 avril 2022, la stratégie polaire à l’horizon 2030. Cette stratégie s’inscrit dans la coopération avec les États membres de l’UE et les autres pays qui partagent la volonté de faire des pôles un espace de concorde et de progrès, selon Paris. Mais, l’élément déstructurant pour l’ensemble de la région et susceptible d’entraîner des tensions irréversibles, le réchauffement climatique provoquant la fonte de la calotte polaire, l’ouverture de nouvelles routes maritimes, l’accessibilité à de nouvelles ressources minières, pétrolières et gazières, la fragilisation de la faune et de la flore, l’émission d’importantes quantités de gaz carbonique. Ces changements mixée avec des éléments susceptibles de générer de nouvelles tensions géopolitiques provoquant la déstabilisation des équilibres environnementaux, commerciaux et économiques de toutes ces régions. L’ouverture de l’Europe du Nord vers le détroit de Béring demeure un atout clé de ces ambivalences : la création d’une voie maritime plus courte de l’Europe vers l’Asie est aussi susceptible de générer un conflit de faire de cette voie maritime une menace pour l’environnement. De même, en Scandinavie et dans les régions russes proches de l’espace baltique, de la mer Blanche et de la mer Barents, le réchauffement climatique suscite un grand intérêt pour la création de grands projets, qui n’étaient pas prévus dans un contexte de maintien, mais qui vont clairement à l’encontre de la préservation des fragiles équilibres existants. Sachant finalement, que la guerre en Ukraine ne fait que rappeler certaines évidences géopolitiques sur la nouvelle bataille de l’Atlantique nord. Si le schisme entre le versant occidental et la Russie ne préfigure pas de conflit ouvert en Arctique, un accroissement des tensions est quant à lui bien prévisible. Il suffit d’observer la nucléarisation de la région et le réarmement des puissances en présence pour le constater. Sur cet échiquier polaire, les pays européens, avec la France doivent tenir leur rôle de puissances d’équilibre afin d’éviter tous scénarios d’escalade militaire.

Au-delà de l’actualité brûlante ukrainienne, les tensions en Antarctique ne sont que le reflet des tensions internationales existants sur d’autres théâtres. Le refus chinois ou russe de se plier aux règles internationales et de reconnaître des aires marines protégées en est un exemple significatif. Cependant, les adhésions de la Finlande et de la Suède à l’Alliance atlantique risque de transformer l’Arctique en une zone sous haute tension pour les prochaines décennies notamment avec la Chine.

MOHAMMED CHÉRIF BOUHOUYA


Pour l’histoire de la France dans les zones polaires, Paul-Emile Victor ou Jean Malaurie font partie de ces grandes figures francises marquantes pour l’exploration et la connaissance des pôles. Malgré cet héritage, la prise de conscience politique et stratégique à l’égard des pôles s’est réalisée tardivement en France. Bien que l’UE soit uniquement membre observateur au Conseil de l’Arctique, avec peu de droits malgré des financements conséquents, à Bruxelles, la conscience sur les questions arctiques n’est pas encore mise à jour. A terme, le drapeau européen devrait supplanter la multitude de drapeaux nationaux qui trônent jusqu’à présent. Et surtout empêcher un apocalypse climatique des pôles qui pourrait nous plonger dans les abysses de l’age de pierre.
















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