dimanche 27 novembre 2022

 GEOPOLITIQUE DE L'IRAN / LE DECLIN D'UNE SECTE PLOUTOCRATIQUE


Si l’islam est né d’une expérience fondatrice reconnue par tous les musulmans, laquelle a donné naissance aux références fondamentales pour le Croyant que sont le Livre Saint  et la Tradition, cette religion doit prendre sa source des deux piliers qui sont le Coran et la Sunna. 

En effet, il n’existe qu’une seule et unique manière d’être musulman, dans la mesure où le Coran n’a désigné aucune autorité spirituelle pouvant légitimer un clergé vertical et centralisé, auquel le fidèle devrait obéir, mais a conféré à la Communauté des Croyants ( Oumma) et à l’individu la responsabilité de vivre La révélation. Il y eut donc rapidement discorde sur l’autorité devant s’exercer dans l’Oumma et sur son rôle. Ainsi, l’islam se divisa dés le VII siècle en différents courants religieux, dont les principaux sont le sunnisme, le chiisme et le kharidjisme. Après la mort du Prophète, les problèmes de succession ne prirent pas des formes violentes et le choix des dirigeants semble avoir été bien accepté par tous les musulmans. Abou Bakr, fut le premier calife et se trouva élevé par l’Oumma au rang de représentant de l’Envoyé de Dieu d’où calife. En effet, le chiisme est né à l’époque de la Fitna, lorsque se sont posés des problèmes d’autorité sous le califat d’Ali. Les membres du parti d’Ali tenaient au principe dynastique, réservant la califat à la prospérité du Prophète, c’est-à-dire à Ali et à ses descendants, en claire une monarchie semblable aux monarchies du Golfe où les famille règnent en maître et sans partage avec le peuple, ce qui n’est pas le cas de l’islam. Si aucun musulman n’a jamais fortement contesté l’idée qu’aucune autorité proprement cléricale ne peut s’établir dans l’Oumma, certains ont, en revanche, l’idée qu’une véritable autorité spirituelle et temporelle avait pu être transmise légitimement par le Prophète à un successeur désigné. C’est la position des partisans d’Ali ( les chiites) cousin et gendre du Prophète. Comme cela a été dit plus haut, rien dans le Coran tel qu’il a été constitué et révélé jusqu’à nos jours ne permet de soutenir une telle thèse. Sachant que du vivant d’Ali, l’on rencontra une telle vision des choses avec la secte des ( Sabaiya) fondé par Abd Allah Ibn-Saba ( VII siècle), que l’on dit avoir été un Juif de Koufa islamisé. Pour Abdallah Ibn-Saba, Ali était une émanation du Divin, il était monté aux cieux et reviendrait comme Mahdi à la fin des temps. Malgré les efforts d’Ali pour l’éradiquer, cette conception émanationniste existera tout au long de l’islam ; et durant le califat d’Ali, il assassinait tous les partisans du chiisme. Au fil du temps, le chiisme s’est implantait comme du venin au sein de la péninsule arabique et dans de la communauté musulmane à nos jours. Sur le plan doctrinale, le chiisme et la continuité de la défaite de la Perse par les musulmans et donc une vengeance éternelle contre cette religion et surtout le sunnisme tel qu’il a était établit par le Prophète lui-même. Sachant que le deuxième calife Omar, a était poignarder durant la première prière par Abou-Loualoua El-Majoussi ( un Perse) et le troisième calife Ottomane fut assassiné par Ibn-Saba et ses partisans. Au plan dogmatique, cette forme du chiisme mit en avant, que le Prophète a était empoisonner  par Abou-Baker et Omar et Ali était derrière l’assassinat de Omar. De la sorte, les ismaéliens construisirent une pensée religieuse complexe. Rejetant l’attachement traditionnel à la Lettre du Coran, cette forme du chiisme mit en avant comme tous les autres chiismes, le sens caché et implicite de la Parole divine accessible à travers l’interprétation des initiés et en particulier des saints imams infaillibles et choisis par Dieu ? Paradoxalement,
Au sein du sunnisme, il n’est de responsabilité dévolue qu' à l’Oumma, c’est-à-dire à l’ensemble des Croyants et à chaque Croyant à l’intérieur de cet ensemble, et que cette responsabilité est double. Il s’agit, d’une part, de la commanderie du bien et de l’interdiction du mal et, d’autre part, du témoignage que cette communauté à travers son organisation générale et à travers chacun de ses membres peut porter des hommes auprès de Dieu. Ils attestent de ce qu’ils sont entrés dans le dessein divin et ont rendu hommage à la Réalité et à la Vérité du Créateur. Ainsi, toute la vie du musulman prendra sens autour de cette responsabilité et toutes les fonctions et les rôles à l’intérieur de la société musulmane découleront de cette mission Coranique dévolue à l’Oumma. Ainsi également, la tache de sacraliser la vie appartiendra à chaque Croyant et non pas à des détenteurs d’une autorité sacerdotale jouissant d’un monopole liturgique, sacrificiel ou sacramental; les chiites opèrent des constructions dogmatiques en postulant la légitimité d’une autorité suprême après le Prophète.

CONSTRUCTION DOGMATIQUE DU CHIISME



Dans le chiisme, seuls peuvent être imams les descendants d’Ali. L’imam chiite ( l’ayatollah en Iran) est le guide des Croyants, c’est-à-dire le véritable chef spirituel de l’Oumma, à la différence des califes désignés par les sunnites dont les chiites ne reconnaissent pas l’autorité. Si dans le sunnisme, la Tradition des dires du Prophète ainsi que les interprétations des écoles sunnites précisent le Coran, dans le chiisme c’est l’imam qui rend la Parole divine Lisible aux hommes, même s’il existe aussi un respect des dires du Prophète. L’imam ou l’ayatollah Allah pour les chiites peut recevoir directement la Révélation divine et conduit au rang supérieure que les Prophète, les messager de Dieu et même les Anges. Le dogme dominant exige qu’un imam soit une émanation, une incarnation, une transfiguration de Dieu. Au yeux des chiites, les imams, Ali puis ses descendants, doivent diriger l’État. Lion d’être des êtres humains ordinaires, ils sont directement désignés par Dieu, et sont en conversation permanente avec Lui. Les imams, en réalité, sont quasiment des personnages « divins ». Au contraire, pour les sunnites, les successeurs du Prophète, qu’il nomment les califes, n’ont pas de caractère divin. Ils gouvernent au nom de l’islam, dont ils affirment appliquer les principes, mais n’ont pas d’accès privilégié à Dieu et ne sont pas non plus des savants religieux. Ainsi, le statut et la nature des imams sont au cœur des divergences théologiques entre sunnites et chiites. Outre les doctrines, certaines pratiques rituelles distinguent les deux branches. Ainsi, les sunnites et les chiites ne prient pas tout à fait de la( même) manière. Les chiites ont aussi développé de nombreux rituels de vénération des imams. Au sein du chiisme duodécimain, qui est le courant majoritaire du chiisme, une lignée de douze imams est reconnue, dont le douzième aurait été occulté à la vue des hommes depuis 13 siècles ? Le dernier imam est censé revenir à la fin des temps pour rétablir le règne de la justice. De magnifique mausolées ont été construits sur la tombe des imams, autour desquels se sont développés des pèlerinages, dont le plus connus restent celui de Najaf en Irak, où se trouve le tombeau du premier imam Ali, et celui de Karbala, également en Irak, autour du tombeau de Hussein, troisième imam et fils d’Ali, assassiné par la majeur partie de sa famille lors d’une bataille qu’il a opposé au calife Yazid fils de Mouayia Ibn-Aby- Sofiane en 680. Parmi les grandes tendances du chiisme, ont trouve les Zaydites, les Ismaéliens, les Noussayris ou Alaouites, les Druzes, les Nazarides et Moustalides. 

L'HEURE DU DECLIN 



Malgré la rupture avec les Etats-Unis et l'affirmation de l'islam politique, l'Iran a conservé les principes nationalistes et les ambitions de puissance de Mohammed Reza Chah Pahlavi 1941-1979, qui avait même initié un programme nucléaire dont les possibles évolutions militaires étaient à peine cachées. Depuis, les interventions iraniennes dans toute la région contre les agressions militaires extérieures, politiques, économiques ou culturelles réelles ou supposées, venant notamment des américains et d'Israël, ont été légitimées par un discours de résistance nationale. Ces ingérence iraniennes dans la région et les actions terroristes perpétrées en Europe dans les années 1980, et bien sûr le programme nucléaire, sont par contre vus à l'étranger comme l'expression prioritaire d'une République islamique hégémonique contrôlée par un clergé chiite radical et encadré par les Gardiens de la révolution. Cette politique de résistance de défense des intérêts nationaux, a connu des succès incontestables en repoussant l'invasion irakienne, en créant le Hezbollah face à Israël, ou en exécutant des prises d'otages au Liban, ou des actions terroristes en France, en Allemagne ou en Argentine. Plus tard, la Force Qods des Gardiens de la révolution a acquis une solide expérience militaire en Syrie, en Irak, au Yémen, en Libye et contre l'Etat islamique pour soutenir les régimes en place, avec notamment l'appuie des Russes, qui ont commis des crimes contre l'humanité. L'industrie nationale d'armement a fait des progrès et produit des missiles qui ont frappé avec une grande précision des bases américains en Irak, des raffineries en Arabie ou les bureaux supposés du Mossad à Irbil. De façon paradoxal, cette politique, accompagnée d'un discours irrationnel et d'une médiatisation rarement égalée contre l'Iran, présenté comme l'ennemi absolu, a renforcé le pouvoir des Mollahs, qui pouvait aisément associer le martyrisme chiite au consensus nationaliste de résistance aux ennemis extérieurs. On ne prête qu'aux riches, mais en faisant de l'Iran un pays terroriste de l'axe du mal, on a probablement surévalué, ou mal paralysé la menace en victime d'une injustice en soulignant qu'elle n'était pas responsable des attentats du 11 septembre, ni de ceux de Paris en 2015, ni de la création d'Al-Qaida et de Daech, ni plus tard de la rupture du JCPOA négocié après tant de difficultés. Depuis sa fondation, la république des Mollahs est restée figée, paralysée et marginalisée dans cette double stratégie défensive et de puissance, sans jamais proposer une politique pro-active, une ambition nationale légitime répondant aux demandes de la population et aux idéaux d'indépendance et de liberté qui avaient fondé la révolution de 1979. Après des décennies de résistance, l'Iran n'a pas libéré les peuples opprimés du Moyen-Orient, ni exploité ses immenses réserves de gaz, ni fait de Téhéran une métropole internationale. Tout les pouvoirs sont détenus par les factions conservatrices depuis la déroute des Réformateurs, incapables de présenter un candidat crédible. Les conflits politiques sont désormais internes et plus exacerbés que jamais entre ces nouvelles élites du clergé, des Gardiens de la révolution , des technocrates chiites et surtout leurs avantages et leurs richesses. Le guide suprême, détient une richesse immense et mène une vie d'un monarque alors que son peuple grève de faim. La jeunesse iranienne n'ont connu que le régime chiite avec son despotisme, ce qui a provoqué la fuite massive des cerveaux, les opposants sont soit derrière les barreaux soit ils ont étaient décapités par le régime. La population connait le potentiel remarquable du pays et n'accepte plus les blocages issus des héritages d'une secte qui n'a pas tenu ses promesses. Le nouveau président à la fois conservateur et pragmatisé, a fait toute sa carrière dans l'appareil d'Etat, comme procureur dans les prisons. Elu par défaut dans un contexte d'effondrement économique, il incarne fort bien l'impasse idéologique de la République chiite incapable de faire le choix et le désarroi d'une nation épuisée. Quand au Guide suprême, Ali Khamenei, Agé de 83 ans, il n'a plus l'autorité ni l'aura nécessaire pour obtenir l'unité du pays, ni imposer clairement des choix pour libérer un peuple en otage d'un régime tyrannique qui a longtemps duré. La situation économique du pays est catastrophique depuis les sanctions américaines et actuellement Européennes. La classe moyenne éduquée ne peut plus financer les études de ses enfants, le ministre du travail a signalé que 45%  des Iraniens, soit 17 millions de foyers, étaient pauvres et que 1 millions de personnes recevaient une aide publique. Les tensions sociales que connait actuellement le pays peuvent tourner à une révolution et la chute des Mollahs. Malgré les émeutes durement réprimées, et le taux des assassinats, le peuple Iranien ne reviendrait jamais en arrière et nul contrainte ne peut lui arracher sa liberté. Conscient de la gravité de la situation, le Guide suprême intensifie les crimes contre les manifestants, face à une population déshéritée qui a longtemps accepté la prééminence d'une secte imposée. En se sens, les Etats-Unis et Israël détiennent des cartes majeures. En bloquant l'ouverture du pays, ils renforcent les forces iraniennes les plus radicales. A Téhéran, les factions conservatrices au pouvoir depuis plus de quarante ans sont usées, n'ont pas renouvelé leur analyse politique et observent de prés leur déclin final. 


Contrairement aux élites du régime impérial, l'exil n'est pas une issue possible pour les militants réformateurs comme conservateurs qui, pour rester en place, ne peuvent offrir que du pragmatisme à une population nouvelle qui a fait l'expérience de la doctrine chiite. Face à un pays appauvri par la corruption, le ploutocratie des élites, les assassinats massives, l'ouverture d'un nouveau Iran ne s'achève pas sans violence ni sans confrontation directe. Les Iraniens ont depuis longtemps compris que face à un régime méphistophélique, la liberté s'arrache par la force afin de fonder un Iran libre, prospère et influent. 

MOHAMMED CHERIF BOUHOUYA

















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