samedi 17 août 2019

GÉOPOLITIQUE/ L'ORDRE DES CIMETIÈRES FACE AUX TENSIONS SÉPARATISTES


La situation actuelle des minorités nationales en Russie et dans l’espace de l’ex-URSS s’explique par l’accumulation de trois grands processus géo-historiques. Le plus ancien nous renvoie aux grandes vagues des migrations euro-asiatiques du 1 millénaire : Khazars turcophones, Varègues scandinaves, Huns turco-iraniens et gothiques se succèdent et s’entremêlent dans des structures de pouvoir embryonnaires mais de plus en plus stables autour de la construction  de l’Etat à partir du II millénaire.

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Au fil du temps, le deuxième processus commence au XVI siècle et vient de la mise en place d’une colonisation intérieure et asiatique par la Russie impériale Tsariste. C’est à partir de cette période, que se structurent les grandes constructions ethniques actuelles depuis le cœur linguistiques et religieux du centre moscovite (groupe slave des Russes, des Polonais, des Biélorusses, des Allemands de la Volga ; groupes letto-lituaniens, et finno- ougriens) jusqu’au gradient périphéries- marges des degrés de l’intégration et de l’acculturation russe ( groupes iraniens des Tadjiks et des Ossètes ; groupes turc des Tatars, Kazakhs, Ouzbeks, Turkmènes et autres Kirghizes ; groupes samoyède des Selkoupes et des Nenets ; groupes mongol des Bouriates et des Kalmoukes ; groupes eskimo-aléoute. Face à cet héritage impérial multiculturel, l’URSS va mener deux politiques fluctuantes et contradictoires. D’un coté, elle valorise l’universalité de l’apparence à la société soviétique sans classe, de l’autre, elle reconnait l’ethnicité de nombreux groupes communautaires et territorialise les principaux groupes nationaux en accordant des statuts d’autonomie politique. Cette phase des minorités construites dans le cadre des Empires coloniaux de la Russie impériale et aussi de l’ex-union soviétique débouche sur une stabilisation provisoire des perceptions ethniques. Ces minorités sont à la fois autochtones, c’est-à’dire en place depuis des générations et différenciées par leur ethnicité et définie par la langue, la race et la religion. Cette vision des minorités et de l’espace russe nous permet actuellement de mieux comprendre le fonctionnement des régions autonomes russes et les futures tensions qui vont éclabousser la Russie de Poutine. A partir de la chute du mur de Berlin en 1989, en quelques mois, 26 millions de Russes deviennent subitement des minorités nationales dans les ex-républiques soviétiques. Se sont surtout la montée des revendications identitaires et le regain xénophobe massif en Russie et surtout les deux guerres en Tchétchénie qui sont les atouts les plus visibles de cet éclatement.
CAUCASE  DU NORD

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A partir de 2003, Moscou mise sur des Tchétchènes qui lui sont favorables afin de remplacer les forces russes. Mis à part quelques intellectuels, les réactions Occidentales sont restées embarrassées et modérées, compte tenu de l’importance stratégique de la Russie et la priorité, après 2001, accordée par Bush à la lutte antiterroriste. La guerre aura fait 1000 000 mort soit environ 15% de la population Tchétchène, avec le silence assourdissant des instances internationales, des puissances et surtout les Etats-Unis. L’opinion russe voit dans la normalisation de la situation en Tchétchénie une victoire contre le terrorisme, et le risque islamiste. En 2009, l’opération anti-terroriste en Tchétchénie est déclarée terminée par Moscou ; mais plus de 30 000 militaires se trouvent encore sur le territoire. L’indépendance n’est guère envisageable et les Tchétchènes sont réprimés et épuisés par le conflit. Pour Poutine cela est inacceptable qui a constaté, par ailleurs, ne pas risquer grand-chose, même en cas de génocide interne. L’Ingouchie et le Daguestan voisins n’ont pas été entraînés dans la voie des tentatives de sécession. Ayant mené à une purification ethnique dans la région. Pour l’UE et l’ONU, l’indépendance Tchétchène est perçu comme un contrôle modèle, vu le risque de l’émergence d’un Etat islamique aux portes de l’Union-Européenne.  La première guerre de Tchétchénie 1994-1996, a été une guerre d’indépendance, mais l’incapacité d’Asalan Maskhdov à gérer le nouveau pays et la volonté russe de revanche ont entraîné la région dans une seconde guerre 1999-2009. Pour Moscou, la défaite  de la première guerre a été vécue comme une humiliation nationale face à un peuple inférieure.  Depuis 2011, la constitution Poutiniene à rétablir la stabilité à Groznyï, s’est transformé en un ordre de cimetière dans la poigne d’acier du criminel du siècle Ramzan Kadyrov. Dans les anciennes républiques indépendantes depuis 1991, l’Arménie, l’Azerbaïdjan et la Géorgie, des régions entières sont devenues mono- ethniques, entraînant un double processus de tensions internes et externes. Dans le cadre des tensions internes, elles mettent face à face Arméniens et Azéris dans la région du Nagorny-Karabakh, Géorgiens et Abkhazes dans le nord-ouest de la Géorgie, Russe et Azéris au nord de Bakou, dans la péninsule d’Apchéron en Azerbaïdjan. Pour les tensions externes, les mouvements séparatistes s’exacerbent, car les nouvelles régions deviennent mono-ethniques. L’Ossétie du Sud et d’Abkhazie sur les frontières nord-ouest de la Géorgie. En 2008, le conflit entre la Géorgie et la Russie est en partie à comprendre dans ses enjeux géopolitiques, les deux régions demandent leur rattachement à la Russie,  une douche froide pour l’UE.


LES TCHÉTCHÈNES ORIGINE ET CONFLIT


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Les tchétchènes sont un peuple musulman, non Slave, installé dans le Caucase du Nord depuis 2000 ans. S’ils n’ont jamais construit d’entité étatique, ils ont néanmoins bâti une société structurée. Au XVIII siècle, les Tchétchènes ont rejeté la colonisation Russe et se sont lancés dans la résistance armée contre les colons Slaves. La Tchétchénie a finalement été conquise en 1858 après de durs combats. Au XX siècle, Staline brisa toute résistance en créant, en 1934, une frontière artificielle entre les républiques autonomes socialistes soviétiques de Tchétchénie et d’Ingouchie, en déportant en masse les Tchétchènes dans les camps de Sibérie, en les accusant d’avoir collaboré avec les Nazis. Il faudra attendre 1957  pour que Khrouchtchev permette leur retour. L’éclatement en 1991 de l’URSS en 15 Etats est vécu comme une opportunité par les Tchétchènes, étant l’unique république autonome au sein de la Russie. Ayant soutenu Eltsine contre les putschistes d’aout 1991, le général Doudaev en profite ensuite pour proclamer le 8 novembre 1991 l’indépendance de la Tchétchénie. Contraint de laisser faire dans un premier temps, Eltsine réagit ensuite, par crainte d’une contagion sécessionniste dans l’ensemble de la Russie et d’une perte d’influence dans le Caucase, et lance en décembre 1944 la première guerre de Tchétchénie. Cette guerre est particulièrement cruelle et sanguinaire. L’accord de paix qui met fin au conflit en 1996 prévoit la tenue, en 2001, d’un référendum sur le statut de la Tchétchénie, tout en donnant une autonomie de fait. Poutine présente la seconde guerre de la Tchétchénie en septembre 1999 comme une opération antiterroriste soutenu par les Etats-Unis. Les Occidentaux pensent qu’elle est pour lui une occasion d’asseoir sa popularité voire son hégémonie dans l’opinion russe, fortement hostile aux Tchétchènes, accusés d’être responsables de la criminalité. Bien que Moscou déclare toujours une politique de normalisation dans les instances internationales, seule la France s’oppose à cette vision hégémonique contre une minorité trahis.
LES NOUVEAUX RAPPORTS DE FORCES ENTRE LES ETATS-UNIS ET L’UNION-EUROPÉENNE

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La Russie considère les Etats-Unis comme la principale menace à ses ambitions sécuritaires et géopolitiques nationales et développe une armée moderne destinée à vaincre toutes les menaces potentielles à la patrie russe et à atteindre ses objectifs de politique étrangère plus larges. Les objectifs du Kremlin comprennent l’établissement d’une sphère d’influence sur les Etats de l’ex-Union soviétique, la prévention de l’expansion de OTAN vers l’Est et l’absence de problèmes internationaux majeurs sans la contribution de la Russie ou à ses dépens. Poutine considère une force nucléaire stratégique puissante et viable comme le fondement de la sécurité nationale de la Russie et considère aussi que les forces nucléaires modernisées et non stratégiques sont essentielles pour faire face aux menaces militaires conventionnelles. Poutine, affirme qu’une nouvelle catégorie de véhicule de glisse hypersonique en cours de développement permettra aux missiles stratégiques russes de pénétrer dans les systèmes de défense antimissile. Moscou améliore ses forces navales stratégiques en construisant et en déployant le sous-marin de missiles balistiques à propulsion nucléaire de classe Dolgorukiy avec le missile balistique lancé sous-marin Bulawa SS-N-32. La Russie dispose d’un stock de plus de 2 000 armes nucléaires non stratégiques. Ceux-ci comprennent des missiles air-sol, des missiles balistiques à courte portée, des bombes gravitaires et des charges de profondeur pour les bombardiers à moyenne portée, les bombardiers tactiques et l’aviation navale ; antisalissure, antisubmarines et missiles antiaériens ; et des torpilles pour les navires de surface et les sous-marins.  Elle maintient aussi une industrie chimique commerciale robuste capable de produire des précurseurs d’agents chimiques de guerre. Les services de renseignement russes GRU, sont de plus en plus impliqués dans les cyberopérations à l’étranger, comme nous l’avons vu aux Etats-Unis, afin de tenter d’influencer l’élection présidentielle Française de 2017 et les attaques contre le réseau électrique Ukrainien.  Actuellement, à travers le monde et surtout au Moyen-Orient et en Afrique, Moscou utilise une gamme complète de capacités, y compris des médias et des sites web pro-Kremlin, des robots et des médians sociaux, des manipulations de moteurs de recherche et aussi des journalistes payés dans les médias étrangers. 


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Bien que la Russie reste une multitude de minorités nationales, sans compter celles issues de l’ex-URSS. Cette diversité est à l’origine de graves tensions, en particulier dans le Caucase. L’exclusion fondée sur la ségrégation et la répression de Poutine, qui considère qu’une minorité est une catégorie sociale qui doit être neutralisée par la discrimination et la force. A long terme, les minorités au sein de la Russie, trouveront le chemin de l’indépendance non pas par les processus de paix, mais par la force des armes.
MOHAMMED CHERIF BOUHOUYA


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