Sur le
plan géopolitique, Moscou sort gagnant car, à part la France et l’Arabie
Saoudite, qui ne cessent de crier au loup en prononçant le nom du dictateur
Syrien, les autres, y compris Washington, voient ce dernier comme un acteur
légitime de la solution. Poutine a ainsi redoré le blason de l’ours impérial
russe, comme au temps de l’opposition, au XIX siècle, à l’empire Ottoman, au
nom de la chrétienté orientale.
Dans les
couloirs du Kremlin depuis 1998, date à laquelle il prend les rênes des services de renseignements intérieurs « FSB » avant d’accéder, dés l’année
suivante, aux plus hautes fonctions de l’Etat, Poutine est un fin stratège car,
ce faisant, il montre que la Russie, en puissance réaffirme, maîtrise le
calendrier quand il est question de la Syrie et même au delà. On n’a jamais su
précisément le nombre d’hommes et de matériels militaires engagés sur le
terrain. Le nouveau Staline de Moscou, a clairement rappelé que des effectifs
resteront en Syrie. L’une des leçons que les Européens n’ont pas tirées de l’Ukraine,
c’est que le Kremlin possède une formidable capacité à laisser un conflit
pourrir, à gérer des Etats faillis à long terme. Tout en tapant sur les
éléments les moins radicaux pour donner raison à hégémonie. La communauté
internationale se réveille alors avec l’obligation de devoir choisir entre deux
Satans. Si la Russie sait maintenir un conflit sous tension, saura-elle montrer son engagement pour la paix afin de répondre aux exigences de l’économie
russe ? Rien n’est moins sur, tant les aspirations de puissance du chef du
Kremlin semblent sans limites.
L'INCERTITUDE DES RELATONS- RUSSO-SAOUDIENNES
Durant la
guerre froide, les relations Saoudo-Soviétiques furent très hostiles. Riyad joua
en effet un rôle déterminant pour empêcher l’Armée rouge de pacifier l’Afghanistan
entre 1979 et 1989, finançant les moudjahidines venus de tous les horizons du
monde sunnite. Avec le retrait russe du pays centre-asiatique, le soutien de
Gorbatchev, dernier dirigeant de l’URSS, aux résolutions du Conseil de sécurité
des nations-unies contre l’Irak après invasion du Koweït en 1990 et la perte d’influence
de Moscou au Moyen-Orient juste avant et après 1991, les liens s’améliorent
quelques peu. Toutefois, plusieurs questions firent encore l’objet de tensions.
Ainsi, de façon récurrente et encore aujourd’hui, Riyad n’apprécie guère les
ventes d’armes russes à l’Iran et critique l’accord pour achever le réacteur
Kraftwerk Union ( KWU, filiale de Siemens), qui a dù cesser ses activités après
la révolution islamique de 1979. La famille des Saouds reproche également à la
Russie de ne pas se rallier aux efforts de l’Organisation des pays exportateurs
de pétrole « OPEP » pour jouer sur les prix du brut. Enfin, lors des
conflits en Tchétchénie « 1994-1996 et 1999-2009 », les responsables
russes accusèrent régulièrement les Saoudiens de soutenir les combattants
islamistes.
L’ERE DU
ROI SALMANE
Il existe
de nombreux points de la politique étrangère de Washington, que Riyad et Moscou désapprouvent. Ainsi, aucun des deux n’apprécie le soutien des Etats-Unies à Israël sur la question Palestinienne. En outre, ni la Russie ni l’Arabie-Saoudite
ne sont à l’aise avec les efforts américains de promotion de la démocratie. A
cet égard, Moscou et Riyad ont critiqué le lâchage de Moubarek en 2011, puis
son soutien à élection de Morsi en 2012 et le gel de l’aide militaire au
régime d’al-Sissi après le coup d’Etat de 2013. La Russie a tout de suite fait
des offres d’armement au Caire, tandisque l’Arabie Saoudite a proposé de
payer les factures. On a perçu à l’époque, un déplacement des alliances du
royaume et de l’Egypte avec Washington vers Moscou. Cette impression s’est
illustrée quand Riyad a, refusé de se joindre aux sanctions occidentales contre
la Russie pour la situation en Ukraine et en Crimée. En ce début d’année 2017,
l’avenir des relations saoudo-russes est incertain. Tant la coopération que la
confrontation sont possibles, parfois même simultanément. Pour compliquer la
tache, ces liens n’obéissent pas seulement à des questions bilatérales, les
deux pays faisant face à des défis économiques et sécuritaires intérieurs qui
peuvent avoir une incidence sur leur capacité à agir en Syrie.
Ils sont par
ailleurs chacun engagés dans un autre conflit, l’Ukraine pour la Russie, le
Yémen pour la monarchie saoudienne, les détournent de la scène syrienne. Enfin,
la relation avec les Etats-Unis, l’Europe et l’Iran est sans doute plus
importante que leur coopération bilatérale. En somme, le Kremlin ne s’attendait
pas à ce que Riyad condamne si fermement son action, considérant qu’elle menace
la sécurité du Royaume.
MOHAMMED
CHERIF BOUHOUYA
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