Les
relations entre l’Egypte et la Russie post soviétique connaissent un essor sans
précédent depuis une décennie et surtout après le renversement du président
Mohammed Morsi. Ce rapprochement repose sur des enjeux stratégiques concernant
les conflits en Afrique et à la fois, un bilan prometteur en matière de coopération
militaire en Libye, au Soudan et même au Sahel. Si ce renouveau dispose d’un
fort potentiel, ce partenariat pourrait ouvrir de nouveaux horizons à
l’influence Russe en Afrique du Nord, de l’Est, de l’Ouest et au Sahel, défiant
ainsi la France, les Etats-Unis et leurs alliés sur ce continent.
Au début
de l’année 2011, le Kremlin établissait des contacts avec les Frères musulmans
à la faveur de l’élection, en juin 2012, de Mohammed Morsi au poste de
président. Agissant plus par opportunisme pour un courant politique islamiste
dont l’accession au pouvoir avait été soutenue par les Etats-Unis, Moscou
répondait avec prudence aux signaux d’ouverture que lui donnaient les
militaires égyptiens, désireuses d’équilibrer leur indispensable alliance avec
Washington. Le coup d’Etat du 3 juillet a changé la donne et fait émerger un
nouveau pharaon d’Egypte (al-Sissi) chapeauté par l’Arabie-Saoudite, les
Emirats Arabes-Unie, la Russie, la France la Grande Bretagne, l’Algérie, le Maroc, la
Tunisie, l’IRAN et l’Irak. Son ascension était surveillée d’un œil bienveillant
en Russie, ou l’on pariait sur sa victoire à l’élection présidentielle de mai
2014. En ce sens, la visite à Moscou en 2014, alors ministre de la défense, et
sa rencontre avec Poutine lui ont apporté une envergure internationale
nécessaire au soutien de sa candidature à la fonction suprême.
L’EGYPTE :
UN PIVOT STRATÉGIQUE DU MONDE ARABE
Le
partenariat en plein renouveau repose en premier lieu sur une convergence de
fond entre Russes et Égyptiens dans la lecture de l’affrontement
idéologico-religieux qui caractérise le Moyen-Orient depuis l’éclatement des
printemps arabes. Les deux pays, considèrent que ces contestations populaires
ont jusqu’à présent profité avant tout aux forces islamistes politiques et
radicales que le Caire et Moscou affirment combattre dans la mesure où elles
représentent des menaces pour leur stabilité. Les deux pays, qui entretienne chacun pour des
raisons spécifiques un rapport conflictuel avec Washington, accusent l’Occident
de complaisance vis-à-vis des organisations islamistes, notamment les Frères
musulmans et les groupes d’opposition en Syrie. Par ailleurs, le régime
Stalinien d’Al-Sissi ne fait plus confiance aux Etats-Unis en raison de leur
soutien aux Frères musulmans puis du gel de l’assistance militaire et financière
américaine apportée à la suite du coup d’Etat de juillet 2013. Le retournement
américain contraste avec la constance et la détermination affichées par la
Russie dans son appui au régime de Damas depuis 2011, ce qui renforce notamment
auprès du régime égyptien l’image de partenariat fiable de Moscou ; un
partenaire qui, de surcroît, ne s’ingère plus dans ses affaires internes.
UNE COOPÉRATION MILITARO-TECHNIQUE RETROUVÉE
Depuis
l’assassinat du président Mohammed Morsi, le Caire cherche à diversifier ses
partenariats stratégiques en matière d’armements ; des achats que le pays
peut s’autoriser grâce à la générosité de ses bailleurs de fonds du Golfe
(l’Arabie-Saoudite, les Emirats, le Koweït et le Bahreïn). L’Egypte a ainsi
conclu des contrats avec l’Allemagne (quatre sous-marins Type 209, la France
quatre frégates Gowind et 24 chasseurs Rafale et la Chine des drones). En 2006,
Russes et Égyptiens avaient signé un contrat d’un montant de 1,5 milliard de
dollars portant sur la livraison de chasseurs MiG-29SE sans oublier la
signature du contrat portant sur la centrale nucléaire de « Dabaa ».
En 2013, ils se sont rencontrés dans le cadre de réunion entre les ministres
des affaires étrangères et de la Défense des deux pays. Lors de ces entretiens,
un contrat d’un montant de 3 milliards de dollars a été signé pour l’achat par
le Caire de 24MIG-29M/M2, de 12 hélicoptères d’attaques Mi-35M, d’une batterie
de défense côtière K300P Bastion et d’un système de défense antiaérienne Tor-2ME. Ce marché a
inclus également la livraison de missiles antichars Kornet et d’hélicoptères de
transport Mi-8/17. L’Egypte est le pays
arabe avec lequel la Russie entretient la relation la plus dense. Comme ce fut
le cas en Irak, celle-ci est parvenue à prendre pied à la faveur du déclin
relatif de l’influence américaine au Moyen-Orient et de la recomposition
géopolitique de la région qui s’est ensuivie. La dynamique positive sur
laquelle repose la relation russo-égyptienne pourrait faire du Caire un
candidat idéal pour l’hégémonie russe en Libye, au Soudan, en Algérie, au Mali,
au et surtout au Sahel, mettant ainsi la
France en alerte permanente.
En somme,
la situation en Afrique a justifié une restructuration de la posture militaire
Française, un déploiement important de troupes américaines et Européennes et
bientôt la présence Russe avec les forces militaires Égyptiennes, dont la
stratégie devrait d’abord commencer par l’invasion du Soudan, puis le Libye, et
ensuite le Mali et le Sahel. Cette région reste tributaire d’un conflit mouvant
entre rupture et continuité, entre adaptation et compétition face aux intérêts
des puissances, l’architecture géopolitique et géostratégique Africaine rentre
dans un nouvel ordre mondial hégémonique.
MOHAMMED
CHERIF BOUHOUYA
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