jeudi 23 mai 2019

GÉOPOLITIQUE/GÉOSTRATÉGIE/ TRUMP ET LE RETOUR DU SOFT POWER AMÉRICAIN: L'IRAN NOUVEAU GENDARME DU MOYEN- ORIENT



Contrairement aux discours qui se sont répondus au début des années 1990, la fin de la guerre froide n’a pas signé la fin des violences politiques dans le monde et les dividendes escomptés de la paix. En ce début du XXI siècle, loin de disparaître, les affrontements entre armées régulières continuent d’alimenter la chronique des violences du monde.
Des conflits présents durant la guerre froide se sont poursuivis (Israël-Palestine), des revendications jusque-là gelées ont refait leur apparition (Caucase et la corne de l’Afrique), tandis que des zones de tension ont émergé à l’occasion de contentieux régionaux ou internationaux ayant pour mobile des territoires ou le pouvoir (Irak, Afghanistan, Côte-Ivoire, Libye, Yémen, Mali, et actuellement l’Iran et les pétromonarchies. La violence n’a donc pas faibli depuis 1989 mais elle a pris des formes nouvelles orchestrées par les officines occultes américaines. Sans disparaître, les conflits internationaux, au sens juridique de « guerre entre Etats », ont laissé la place aux conflits internes.
Résultat de recherche d'images pour "l'iran et trump et poutine"




IRAN-ETATS-UNIS/ LES ORIGINES

Après la seconde guerre mondiale, l’Iran cherche la protection américaine contre les ambitions Soviétiques. Les Etats-Unis aident le Shah d’Iran à écarter Mossadegh, premier ministre progressiste vainqueur des élections et très populaire. Le Shah passe une alliance stratégique avec Washington, reconnait Israël et lui fournit du pétrole à la grande fureur des pays arabes, rompant même les relations diplomatiques avec Téhéran. Le choc pétrolier de 1973 qui permet un fort développement économique qui s’ajoute à son poids démographique, et la bonne relation avec Israël vont faire de l’Iran un allié incontournable des Etats-Unis. La révolution Khomeyniste de 1979 et la prise d’otages par des étudiants chiites des diplomates américains de novembre 1979 à janvier 1981 amènent une rupture des relations diplomatiques, le gel des avoirs Iraniens aux Etats-Unis et l’arrêt des relations commerciales. Dans la guerre qui va opposer l’Irak et l’Iran, les américains vont jouer sur les deux tableaux. En 1986, éclate le scandale de l’Irangate : Les américains fournissent des armes à l’Iran pour obtenir la libération d’otages au Liban. Après une tentative de rapprochement sous la présidence Clinton, les relations se dégradent lorsque en janvier 2002, Bush classe l’Iran dans les pays de « l’axe du mal » avec l’Irak et la Corée du Nord. En 2003, la guerre d’Irak débarrasse l’Iran d’un ennemi potentiel mais lui  fait craindre une opération militaire américaine contre lui. L’Iran est accusé de soutenir le terrorisme et de développer un programme nucléaire dont la vocation serait avant tout militaire. Les Européens qui ont engagé dans les années 1990 un dialogue critique avec les Iraniens essayent d’abord de trouver une issue diplomatique à la crise nucléaire, puis adoptent une position commune avec les Etats-Unis. La Russie et la Chine verraient d’un mauvais œil l’Iran accéder à l’arme nucléaire, mais entament de bonnes relations avec les Mollahs afin de briser le monopole du pouvoir dans la région aux Etats-Unis. Mais l’Iran se sent encerclé par le dispositif militaire américain. L’Iran, inquiet des difficultés économiques créées par son isolement, accepte le dialogue. Un pouvoir plus modéré entame une transition en catimini et une libéralisation progressive du régime. L’Iran se convainc que sa sécurité sera mieux assurée ainsi que par la voix de la confrontation. Au fil des tractations géopolitiques, le dialogue américano-iranien échoue. L’Iran se crispe et continue d’avancer vers le nucléaire militaire. Les Occidentaux sont confrontés au dilemme de voir l’Iran devenir une puissance nucléaire ou de se lancer dans une guerre incertaine et risquée dans toute la région.

MOSCOU ET LE PROGRAMME NUCLÉAIRE IRANIEN

Résultat de recherche d'images pour "liran et poutine"

Si le programme nucléaire iranien est né dans les années 1950 dans le cadre d’une coopération avec les Etats-Unis, force est de constater que, dés la décennie 1970, la Russie a ouvert des négociations avec l’Iran dans ce domaine stratégique sensible. Cette disponibilité Soviétique allait de pair avec l’ambition du Shah Mohammed Reza Pahlavi (1941-1979) de mettre en œuvre une politique étrangère autonome vis-à-vis de Washington. En conséquence, on a dés lors observé un développement significatif des échanges économiques entre Téhéran et Moscou. La prise de conscience par les iraniens de l’intérêt, pour l’Iran, d’avoir un programme nucléaire date depuis 1982. Mais ce n’est qu’au début des années 1990 qu’un dialogue fut établi avec les Russes pour poursuivre la construction de la première tranche de 1000 mégawatts ( à l’origine, le projet avec KWU prévoyait la réalisation de deux tranches de 1200 mégawatts). En revanche, avec les pays européens, en particulier la France et l’Allemagne, des accords de coopération concernant le nucléaire civil ont été conclus : ils prévoyaient la construction de la centrale de Bouchehr par Kraftwerk Union ou « KWU », une filiale de Siemens, qui débutera en 1974, et de celle de Darkhovine Framatome, devenue Areva Nuclear Power en 2006.  Cette situation explique les projets de l’Iran et de la Russie de construire deux nouveaux réacteurs nucléaires pour la centrale de Bouchehr. De même les tentatives de sociétés Chinoises de prendre pied dans un secteur hautement stratégique doivent être compromises dans ce contexte de normalisation de la situation internationale de la république des Mollahs. Si les compagnies chinoises ont l’avantage de pouvoir apporter des financements pour ces projets, la technologie Russe reste, dans ce domaine, supérieure.

LE PROJET DE CORRIDOR NORD-SUD
Résultat de recherche d'images pour "LE PROJET DE CORRIDOR NORD SUD"

Le territoire Iranien se situe à la croisée des mondes indiens, centrasiatique, arabe, et turc. Pour valoriser sa position de carrefour stratégique, l’Iran participe au projet de nouvelle route de la soie, donnant accès à un marché régional de 300 millions de personnes. Pays de transit entre l’Europe et la Chine, l’Iran veut également devenir un acteur incontournable sur un axe Nord-Sud. Sa volonté de développer son commerce bilatéral en roubles et en rails en remplacement de l’euro et du dollar s’accompagne de la mise en place de vols commerciaux entre la ville d’Astrakhan, dans le Sud de la Russie, et son territoire. Il existe également des projets de routes marchantes, comme le corridor international Nord-Sud et l’axe entre l’Inde et la Scandinavie passant par l’Iran et la Russie. A travers le port de Chabahar, la république islamique peut contribuer au développement des pays d’Asie centrale. Autrement dit, l’accord sur le nucléaire et la levée graduelle et conditionnelle des sanctions favoriseraient commerciaux entre l’Iran et ses voisins, dont la Russie. S’agissant de la situation géopolitique irano-russe au Caucase du Sud, l’Arménie profiterait de la normalisation de la situation internationale de l’Iran. En effet, la fin des sanctions liées au programme nucléaire de l’Iran pourrait conduire à une augmentation du PIB arméniens de 2%, l’objectif étant de faire passer les échanges bilatéraux annuels de 300 millions à un milliard de dollars par an. Enfin la Russie a toujours conservé une attitude ambivalente sur le dossier Iranien. D’un coté, elle soutient les sanctions Onusiennes, de l’autre, elle s’oppose aux mesures unilatérales américaines et Européennes. On peut noter des perspectives nouvelles dans les coopérations stratégiques sensibles en raison de la nécessité pour Téhéran d’accéder à des technologies militaires ou dans le domaine du nucléaire civil que seule la Russie peut lui offrir. De plus, un Iran normalisé est un partenaire plus fiable dans les coopérations régionales, qu’ils s’agissent de l’ancien espace soviétique, de la stabilisation de l’Afghanistan ou du Moyen-Orient. En revanche, le retour des entreprises Européennes ou une hypothétique arrivée américaine qui constitue un défi pour la Russie, mais plutôt l’inclusion de l’Iran dans une sphère d’influence économique de la Chine englobant en même temps le Pakistan. En effet, les entreprises Chinoises ne sont pas soumises aux limitations des sanctions primaires américaines s’agissant du secteur du nucléaire civil et des équipements militaires.  

Résultat de recherche d'images pour "CCG DU"

A travers ses bouleversements géopolitiques et géostratégiques concernant l’Iran, la Russie, les Etats-Unis, la Chine et même les Européens veulent imposer la république islamique comme le « gendarme du Moyen-Orient ». La crise que traverse le Moyen-Orient est de transition sociohistorique : l’époque post-guerre froide, la question postottomane, l’ère post-postcolonial, l’émergence de puissances régionales, vont aboutir à des modèles qui dépasseront le nationalisme et l’islamisme, sachant que les Etats-Unis, la Russie, la Chine, et la France resteront aux commandes pour sauvegarder leurs propres intérêts.

MOHAMMED CHERIF BOUHOUYA   






Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire