Alors que
l’Afrique subsaharienne est l’une des régions du monde qui enregistre le plus
grand nombre de conflits, les zones conflictuelles régionales sont rongées par
un amalgame complexe de menaces, souvent interdépendants, mêlant affrontements communautaires,
terrorismes, criminalité organisée et insécurité maritime. Le conflit Libyen, déclenché
depuis la chute de Kadhafi, tend à la fois à muter et à s’étendre aux pays
voisins comme la Tunisie, l’Algérie, la Mauritanie, le Maroc, et le Tchad. Sachant
que l’Afrique de l’Ouest comme l’Afrique centrale se trouvent aujourd’hui
confrontées à des conflits majeurs.
Les zones
conflictuelles subsahariennes restent de nature transrégionale, ou j’ajoute le
drame que constituent les cycles de violences quasi ininterrompus qui affectent
toute la région. L’Afrique de l’Ouest comme l’Afrique centrale se trouvent
confrontées à des conflits majeurs. D’une part, autour de la bande Sahélienne
(le conflit Nord-Mali et l’Ouest Nigérien et le Nord du Burkina Faso). D’autre
part, autour du bassin du Lac Tchad, ou le groupe Boko Haram sévit au Cameroun et
au Nigéria, Pour endiguer ces menaces, sont récemment apparus des
arrangements sécuritaires « ad hoc », se situant hors de architecture Africaine de paix et de sécurité ( African Peace and Security « APSA »)
définie dans le cadre de l’Union africaine « UA » et des Communautés
économiques régionales « CER » : ont ainsi mises sur pied la
Force multinationale mixte « FMM » dans le cadre de la commission du
Basin du Lac Tchad « CBLAT », puis la force conjointe du G5 Sahel, forces auxquelles contribuent des Etats appartenant à trois communautés économiques
régionales différentes ( CEDEAO, CEEAC et UMA. On a également assisté à la mise
en place de mécanismes interrégionaux de coopération, entre la CEDEAO et la
CEEAC en matière de lutte contre l’insécurité maritime et la piraterie. Cela révèle
une certaine inadaptation de l’APSA, qui doit se réformer pour prendre en
compte le caractère fondamentalement transnational et asymétrique des menaces
prévalant sur le continent, mais a quel prix ? Certes, la pertinence et l’efficacité
des outils mobilisés par les partenaires internationaux, aussi bien
multilatéraux que bilatéraux, se trouvent elles aussi défiées, qu’il s’agissent
des opérations de maintien de la paix déployées par les N-U, des interventions
militaires menées par certains Etats ou des multiples programmes d’assistance
en matière de prévention des crises, d’alerte précoce, de gestion des conflits,
de consolidation de la paix, de désarmement, et la démobilisation
réintégration/ réinsertion « DDR », de contrôle des armements. Dans
cet espace immense et incontrôlable, les périmètres ethniques pèsent bien davantage
que les frontières nationales. De plus l’allégeance à la communauté est
primordiale et supplante bien souvent l’allégeance citoyenne aux Etats. Ces
logiques sociologiques favorisent l’implantation de Boko Haram de manière
durable. La FMM constitue une riposte internationale impliquant le Nigéria, le
Cameroun, le Bénin, le Niger et le Tchad dans le cadre de la CBLT. Mais l’approche
adoptée par l’armée Nigérienne ainsi que les violences qui sont imputées à certains
contingents ont contribué à nourrir la défiance des populations, ce qui sape l’efficacité
de la lutte engagée. En RDC, voilà plus de deux décennies que les provinces de
l’Est sont la proie de violences de la part de groupes armés aux contours
mouvants, sur fond de pillage, de meurtre et de viols, tandis que la transition
politique n’a cessé d’être repoussée ( de telles scénarios s' intensifient
également au Soudan et en Algérie). Depuis
2016, de terribles atrocités ont été commises dans la région du Kasaï. Le
conflit a éclaté lorsque les forces de sécurité Congolaises ont tué « Jean-Pierre
Mpandi, un chef coutumier, poussant ses partisans à créer une milice antigouvernementale
appelée « Kamuina Nsapu ».
DES
CONFLITS MOUVANTS ENTRE RUPTURE ET CONTINUETE
Les
opérations de paix ont fait l’objet de nombreux débats doctrinaux aux cours des
25 dernières années. L’Agenda pour la paix commandé par Boutros –Ghali,
préconisait déjà leur réforme dans le contexte de sortie de la guerre froide.
Il sera suivi du rapport Brahmi en 2000, puis du document « Blue Horizon en
2009 », et enfin du rapport produit par le Groupe indépendant de haut
niveau chargé d’étudier les opérations de paix (HIPPO) en 2015. Ce dernier a
été plus récemment encore complété par les observations du rapport Cruz
préconisant une approche plus robuste du maintien de la paix a vu le jour en
2018. Après l’organisation par la présidence Néerlandaise du Conseil de sécurité
des N-U d’un débat visant à améliorer l’efficacité et le fonctionnement des opérations
de maintien de la paix. La déclaration d’engagements communs signés, en 2018,
par 151 Etats sur les 139 membres de l’ONU, inclut sept objectifs qui
réaffirment la primauté des solutions politiques aux conflits, poussant à un
renforcement de la protection des civils mais aussi du personnel engagé par les
missions de maintien de la paix. Invitent aussi à améliorer l’efficacité des
dispositifs ( meilleure performance notamment en matière de formation et de
planification, aide à l’adaptation nationale des processus, correction des
défaillances, en particulier éthiques) ainsi que la bonne cohésion des
partenaires internationaux relatifs au maintien de la paix, dans et en dehors
du cadre Onusien. Au fil des années de braises qui embrassent toute ces
régions, les propositions contenus dans cette nouvelle initiative n’ont jamais
vus le jour.
Des tractations diplomatiques sans cesse annoncées sont toujours repoussés dans la continuité des conflits. A travers se
continent, le conflit de pouvoir se transforme toujours en sale guerre et à moyen
terme, il sera appelé à durer dans d’autres pays. Paradoxalement, aucune
puissance ne cherche à éviter un embrassement conflictuel dans ses régimes
fragiles et dont la reconstruction reste très lointaine. Dans ses conflits
asymétriques à multiplicité d’acteurs, l’hégémonie des puissances ont fait de l’Afrique
le point d’ancrage de leur retour sur la scène internationale mettant en avant l'émergence d'un nouvel ordre mondial. Loin d'aboutir à une période de paix, notre époque s'est en réalité patiemment édifiée autour d'antagonismes larvés et de failles coupables laissant désormais la place à des radicalités mortifères.
MOHAMMED
CHERIF BOUHOUYA
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