Depuis 2008, la Russie ouvre des
négociations avec la Syrie afin d’établir une base navale. Les travaux
commencent en 2009 avec pour objectif que le site soit capable d’accueillir des
navires de guerre de premier rang, comme des destroyers, voir des porte-avions,
que Moscou prévoit alors de mettre en service au sein de sa marine à l’horizon
2020.
Avec la doctrine maritime de la
Russie de 2001 stipulant que le pays aspire à entretenir une présence
permanente en Méditerranée et le Moyen-Orient, le rôle joué par la Syrie pour
la marine russe est appelé à être revalorisé. Dés 2004, Poutine établit un
programme fédéral, intitulé (Création d’un système de bases navales pour la
flotte de la mer Noire sur le territoire de la Fédération de Russie pour la
période 2020.) Moscou dégage un budget de prés de 2 milliards de dollars, et qui
prévoit, la modernisation et le développement des infrastructures navales à
« Tartous en Syrie ». La fin de la première étape des travaux de
modernisation était prévue pour 2012, Tartous devant alors passer du statut de
point d’appui matériel et technique à celui de point de déploiement. L’autre
phase devrait permettre au port de devenir une base navale à l’horizon 2020.
Moscou entame parallèlement des travaux dans le port de Lattaquié, d’une
profondeur d’ancrage plus importante de 21 mètres, en procédant à élargissent
d’un Chanel et à la construction d’un embarcadère afin de permettre à des navires
de plus gros tonnage d’accoster. A la veille de l’éclatement de la crise
Syrienne, Tartous devient le symbole de la coopération militaro-technique entre
la Russie et Damas.
LA CRISE SYRIENNE DE 2011
A la suite de l’éclatement du conflit en 2011, la Russie gèle les plans de modernisation prévus, de crainte ou elle pourrait être expulsée en cas de changement de régime à Damas. En 2013, le personnel civil et militaire Russe est évacué du port et le Kremlin prospecte ailleurs en Méditerranée. Chypre et le Monténégro constituent dés lors deux pays potentiels. En 2015, Moscou et Nicosie signent un accord fournissant un cadre légal à l’utilisation du port Chypriote de Limassol par les navires de guerre russes, la candidature du Monténégro pour intégrer l’OTAN complique les options de la Russie. Tartous devient le principal point d’entrée de l’aide technique et militaire fournie par Moscou à Damas. Ce changement géostratégique de taille, a permis aux navires russes qui empruntent la route maritime reliant Novorossiisk, en mer Noire, au port syrien, en passant par les détroits Turcs. Les bâtiments disposant d’un tonnage important accostent à Lattaquié, ce qui devient dangereux dés l’année 2014, compte tenue de la proximité de la ligne de front et de l’avancée des groupes rebelles. Dés 2015, l’intervention militaire Russe change la donne, en déployant en Syrie 1700 militaires chargés de la protection des installations et de leur mise à niveau afin qu’elles soient en mesure de recevoir le flux grandissant de matériels et d’armements provoqué par le lancement de la compagne aérienne par le Kremlin. En 2016, Moscou a envoyé en Méditerranée une corvette lance-missiles équipée de missiles de croisière « Kalibar », à destination de Tartous. La Russie dispose en effet d’installations aéronavales en Méditerranée, ce qui n’avait plus été le cas depuis l’effondrement de l’URSS. Si Poutine parvient à les conserver à l’issue d’un futur règlement politique du conflit, il lui servira à projeter son influence et sont hégémonie au levant, au Moyen-Orient et, au-delà vers l’océan Indien.
L’ENGAGEMENT MILITAIRE RUSSE DEPUIS LE CONFLIT
En 2015, l’armée russe a entrepris des manœuvres de grande ampleur en Russie, mobilisant prés de 100 000 militaires. Au cours de cette année, le pays a multiplié les contacts diplomatiques avec les États-Unis et l’Arabie saoudite, recevant même les dirigeants des Émirats arabes unis, de la Jordanie et de l’Égypte. Ce ballet diplomatique a placé les capitales Européennes en position d’alerte maximale. Durant la même année, des soldats russes étaient identifiés auprès de l’armée régulière Syrienne, des mouvements de navires étaient observés dans les détroits et prés des cotes Syrienne, ainsi que la mise en place d’un pont aérien russe dans un aéroport militaire prés de Lattaquié, ou l’on dénombrait plus de 30 avions de combat russes. Le Kremlin est parvenu à entretenir le flou sur les cibles visées, il est apparu que l’aviation russe bombardait les positions d’autres groupes rebelles, comme « Jabhat al-Nousra et Ahrar al-Sham, et pas l’État Islamique. Ce culturisme géopolitique orchestré par Moscou, exprime une volonté d’affichage de sa puissance, tout en révélant qu’il fait partie de la coalition arabo-occidentale et déterminé dans la lutte contre les djihadistes. Ce discours est démultiplié par une utilisation intensive des outils numériques encadré par les services secrets visant à semer la confusion chez les occidentaux et à entretenir l’idée que les dirigeants Européens et Américains restent divisés et fragilisés. L’objectif de Poutine est de réussir la polarisation des intérêts dans la région, en accord avec sa propre lecture des relations internationales. Pour le Kremlin, la ligne de clivage ne sépare plus, comme à l’époque de la guerre froide, selon sa vision, il fait face à un occident en déclin, incapable d’exporter son modèle politique, à des États rejetant toute forme d’ingérence occidentale, notamment par la responsabilité de protéger, de même que les valeurs libérales. Moscou reste obsédé par sa quête de parité avec les États-Unis, les élites russes demeurant profondément antiaméricaines. Craignant une érosion de son statut, Poutine s’est appuyée sur le conflit Syrien pour tenter d’opérer un retour stratégique au Moyen-Orient, sur fond de confrontation entre les Occidentaux et l’Iran. Ce défi lancé à Washington trouve son prolongement dans l’opposition de Moscou à toute forme d’ingérence étrangère. Pour les services secrets russes qui observent de prés toutes les théories complotistes, les événements nés des printemps arabes émanant d’un complot ourdi par le camp sunnite regroupant les pétromonarchies du Golfe et la Turquie, le Kremlin a adopté une politique Syrienne excluant tout changement de régime.
L’ÉMIRAT DU CAUCASE ET LA PHOBIE DE MOSCOU
Le Kremlin, essaye d’empêcher la cristallisation d’un émirat islamiste au Caucase. Les avancées djihadistes sur le théâtre syro-iranien concernent directement la Russie en raison du nombre de ses ressortissants qui combattent auprès de Daech et de Jabhat al-Nousra. Prés de 4800 Russes auraient rejoint l’EI depuis 2015, ils formeraient la troisième nationalité la plus représentée dans ses rangs. Daech a besoin de ces hommes aguerris au combat, ils sont autonomes vis-à-vis des clans et des intérêts locaux. Au sein de cette organisation, plusieurs Tchétchènes font partie du haut commandement militaire. A long terme, Moscou peut craindre un accroissement de la porosité entre les théâtres syro-irakien et Caucasien. Les djihadistes du Caucase ont essuyés de nombreuses défections au profit de l’EI. Ses combattants préfèrent rejoindre la lutte pour le califat, avec le prestige que cela confère à leur retour en Russie. Proclamé en 2007, le califat Caucasien a été plusieurs fois décapité par les services Russes et dont les orientations idéologiques nées de la rivalité avec l’EI minent son efficacité opérationnelle. Depuis 2015, le Caucase est qualifié de (WILAYA DE L’EI), ce qui signale une volonté d’implantation territoriale dans la région ; le renforcement militaire russe en Syrie ne pourra qu’aimanter la djihadisme caucasien. Sur le plan diplomatique, la présence de combattants caucasiens au levant, légitime les axes de la diplomatie Russe au Moyen-Orient. La stratégie du Kremlin et de nouer des relations fondées sur des intérêts sécuritaires mutuels, tant avec la Syrie, l’Égypte, le Yémen qu’avec les pétromonarchies sunnites et Israël, qui cherche à compenser les atermoiements de la diplomatie Américaine.
La stratégie machiavélique de Moscou est que les Occidentaux resteront impuissants face aux frappes de son aviation. Cette passivité s’est confirmée en 2015 lorsque les dirigeants russes, après la destruction d’un de leurs avions par la Turquie, ont déployé des systèmes S-400 en Syrie. Cette tactique a eu pour conséquence de verrouiller le ciel proche-orientale et de contraindre les Occidentaux à consulter l’état-major russe.
MOHAMMED CHÉRIF BOUHOUYA
(1)- L’HISTOIRE DE LA RUSSIE ET LE
MOYEN-ORIENT
Sur le plan historique, la Russie et le Moyen-Orient ont une longue histoire commune. Le Caucase du Nord, qui fut intégré à l’empire Russe au XIX siècle, fut en partie sous influence des Perses pendant l’Antiquité, puis du Califat Arabe à partir de 644. L’expansion massive des Arabes dans la région, qui se mélangèrent avec les locaux, favorisa la conversation à l’islam qui devient une religion de masse très dominante au Moyen Age, mais pas sous le sabre?. Après l’adoption du christianisme en 988 et le début du pèlerinage Russe en terre Sainte, la Russie établit des liens consolidés avec le Levant. Les premiers contacts diplomatiques remontent à 922, quand un ambassadeur de Bagdad fut invité par le souverain de la Bulgarie de la Volga pour y propager l’Islam. Entre le XIII et le XV siècle, la Russie fut soumise à la domination des Turcos-Mongols de la Horde d’or 1243-1502, qui entretien des relations avec le Moyen-Orient et l’Asie centrale, convertie à l’Islam depuis le VII siècle, surtout quand Ozbeg Khan, souverain de la Horde d’or 1312-1341, eut adopté la foi musulmane comme religion d’État. La Russie, qui intégra à son territoire la Sibérie et la Volga au XIX et XVII siècles, commença à instaurer son influence en Asie centrale sous Pierre I le Grand 1682-1725. Après la révolution bolchévique en 1917, l’ensemble de l’Asie centrale fut intégré à l’Union soviétique, sous forme de républiques formées sur une base ethnique et l’islam fut sévèrement réprimé. Le rapprochement actif avec le monde Arabe a commencé après la seconde Guerre mondiale, lorsque les régimes nationalistes de centre gauche ont émergé dans la région. Les intérêts Russes se tournent vers les régimes socialistes comme (l’Égypte, l’Algérie, le Libye, la Syrie et l’Irak), De nombreux projets industriels ont vu le jour avec le soutien de la Russie, qui a également opéré des transferts d’armements majeurs et offert une assistance aux armées des États Arabes. Jusqu’ a nos jours, certains pays adopte une diplomatie dictée par la Russie, comme l’Algérie et autres pays.
(2)- CHRONOLOGIE DE LA RUSSIE ORIENTALE
(988)- Vladimir I le Grand reçoit le baptême et impose la religion chrétienne.
(1774)- le traité de Ketchup-Kaïnardji met fin à la guerre russo-turque pour le contrôle des débouchés sur la mer noire. Catherine II devient la protectrice des populations orthodoxes de l’empire Ottoman 1762- 1796.
(1853-1856)- Guerre de Crimée entre la Russie de Nicolas I et l’Empire ottoman d’Abdlülmecid I 1839-1861.
(1860)- Ouverture d’une mission russe à Jérusalem.
(1882)- Fondation de la société impériale orthodoxe de Palestine.
(1946)- Crise d’Azerbaïdjan : l’URSS soutient le Gouvernement populaire d’Azerbaïdjan, proclamé en 1945 dans le nord-ouest de l’Iran. Sous la pression du Royaume-Unis et des États- Unis, Moscou retire ses forces.
(1971)- L’URSS et l’Égypte signent un traité d’amitié et de coopération ; il est abrogé cinq ans plus tard. La même année, Moscou ouvre une base navale à Tartous en Syrie.
(1979-1989)- Guerre d’Afghanistan : Moscou soutient le régime communiste de Kaboul face aux moudjahidines islamistes.
(1990)- l’URSS s’engage à terminer la construction de la centrale nucléaire de Bouchehr en Iran.
(1991)- Chute de l’URSS ; début de grandes vagues d’immigrés russes juifs vers Israël.
(1994-1996)- Première guerre de Tchétchénie, depuis ont assiste a une épuration ethnique, voire un génocide du Kremlin. Puis la seconde campagne de Tchétchénie 1999-2009.
(2007)- L’Iran achète à la Russie des systèmes de défense aérienne, dont la livraison doit se faire courant 2016.
(2011)- La Russie s’abstient au vote du conseil de sécurité sur l’intervention occidentale en Libye.
(2014)- Poutine reçoit Al-Sissi à Sotchi, les deux dictateurs se reverrons quatre fois jusqu’en 2015.
(2014- 2015)- Des commandants de l’Émirat du Caucase prêtent allégeance à l’EI.
(2015)- Poutine inaugure la grande mosquée de Moscou, la plus vaste d’Europe « 19000 » mètres carrés. Seuls les présidents Turc et Palestinien ont étaient présents.
19 novembre 2015 : L’Égypte et
la Russie signent un accord prévoyant la construction de la première centrale
nucléaire dans le pays arabe. Un mois avant, un avion russe transportant 224
militaires s’écrase dans le Sinaï égyptien, il sera revendiqué par l’EI.
(2016)- La Russie s’accorde avec l’Arabie Saoudite, le Qatar et le Venezuela pour geler la production de pétrole afin de calmer les marchés. Le 14 mars de cette même année, le Kremlin annonce le début du retrait des forces engagées en Syrie. Pour cette déclaration l’opinion internationale reste sceptique.
- D’un point de vue commercial, les principaux partenaires de la Russie sont :
-La Turquie : 24 milliards d’exportations et 6 milliards d’importations en 2014.
- Israël : 2,26 milliards et 1,13 milliards
- Égypte : 4,90 milliards et 560 millions
- Iran : 1,33 milliards et 360 millions
- Emirates Arabe Unis : 1,80 milliards et 270 millions
-Pays bas : 70 milliards de
dollars d’exportation et la Chine avec 40 milliards. Ces deux pays restent de premier ordre.
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