mercredi 22 juin 2022

GÉOPOLITIQUE DU CAUCASE/ ENTRE SOUVERAINETÉ ET INGÉRENCE

Soviétisé entre 1920 et 1921, le Caucase fait l’objet d’un découpage très complexe et arbitraire des frontières. Le centre russe, menant une politique de division des peuples pour mieux régner dans la zone, attribue différents statuts aux populations concernées. Ainsi, les Arméniens du Haut-Karabagh, les Abkhazes, les Ossètes du Sud et les Tchétchènes forment-ils des régions où république autonomes respectivement intégrées aux républiques socialistes soviétiques d’Azerbaïdjan, de Géorgie et de Russie, elle-même constitutives de l’Union soviétique.



Dés lors, leurs revendications à une plus grande autonomie ou à des changements de statut ou de frontières seront en partie ignorées ou réprimées. Depuis, la question de l’acheminement du pétrole et du gaz de la région vers l’Occident transforme l’enjeu des conflits avec d’autres acteurs pour des raisons énergétiques mettant toute la région sur les braises de la guerres. La Russie continue de voir dans cet espace une zone d’intérêt stratégique. Les États situés à sa périphérie ont appris à leurs dépens qu’ils doivent gérer avec prudence leurs relations avec Moscou. Malgré ses récentes efforts de réaffirmer son rôle de puissance dominante au sein de la région, il est indéniable que la force d’attraction du Kremlin s’affaiblit progressivement et que les pays caucasiens poursuivent la diversification de leurs relations extérieures, mais à quel prix? Cette vulnérabilité croissante de la Russie a permis à diverses forces centrifuges d’exercer sur ces anciennes républiques soviétiques, tout en les attirants vers de nouvelles abysses. Après l’effondrement de l’URSS, les puissances occidentales, États-Unis et UE, qui étaient des partenaires de choix pour ceux qui cherchaient un contrepoids à la traditionnelle hégémonie russe. Or, dans le nouveaux contextes géopolitiques et géostratégiques, cette coopération semble s’effriter à mesure que l’intérêt des Occidentaux se réoriente afin de faire face à des nouveaux défis notamment la montée foudroyante de la Chine. Moscou, doit désormais composer avec de nouveaux rivaux comme la Turquie et l’Iran qui ont su solidifier leur influence dans la région, mais encore d’autres pays qui ont développer de liens dans la région comme les pays du Golfe Arabo-Persique, Israël, La Corée du Nord et la Chine. D’un point de vue stratégique, la Russie au-delà de se porter garante de la stabilité de la région, elle a tout planifier afin de conserver son hégémonie sur les relations que les anciennes républiques entretiennent avec l’extérieur. Les conflits avec la Turquie l’Arménie et l’Azerbaïdjan n’eut d’autre alternatives que de demander protection et assistance de la Russie. Par divers programmes dans le cadre de la Communauté des États indépendants ( CEI) ou l’organisation du traité de sécurité collective ( OTSC), le Kremlin a assumé la protection des frontières arméniennes et le maintien de son économie, tout en s’accaparant de secteurs clés tels que la distribution d’énergie. Avec la guerre qui secoue actuellement l'Ukraine, l’Arménie prévoit déjà à diversifier ses partenaires économiques à mi terme. Du fait de son adhésion à l’Union économique eurasienne ( UEE) et du poids économique de Moscou dans le pays. Sur un plan stratégique, la Russie envisage la création de nouvelles voies de transport à travers l’Arménie et l’Azerbaïdjan, l’objectif est de relier directement la Russie à la Turquie et à l’Iran, créant de nouvelles liaisons Nord-Sud et Est Ouest. Cela renforcerait la présence de la Russie dans le région tout en permettant de nouveaux liens entre la mer Caspienne, la Méditerranée ainsi que le Golfe Persique. De tels stratégies indisposent la Géorgie, qui criant que toute nouvelle infrastructure de transport parrainée par Moscou ne sape son rôle de principale route commerciale Est-Ouest entre la mer Caspienne et la mer Méditerranée. Ces projets prévus irritent déjà l’Arménie, compte tenu de son déficit de confiance envers Ankara et Bakou. En claire, la méfiance des Arméniens, l’absence d’un plan global de paix ou de stabilisation au Haut-Karabagh et l’isolement géopolitique continue de compliquer cette vision du transport régional. Sachant, qu’il reste que la nouvelle donne géopolitique depuis la fin des hostilités en 2020 offre de nouvelles opportunités à l’Iran et, surtout, la Turquie.

VERS LA DECLIN DE L’ENGAGEMENT EURO-ATLANTIQUE

En dépit de la volonté du Kremlin de préserver son influence exclusive, tous les dirigeants sud-caucasiens ont été portés par les liens économiques et politiques avec les États-Unis et l’Europe au cours des années 1990. L’Azerbaïdjan et la Géorgie sont devenus des maillons importants dans les lignes d’approvisionnement traversant le Caucase du Sud et l’Asie centrale vers l’Afghanistan. Les retraits américains d’Afghanistan et d’Irak, le changement de priorités de Washington, de l’Europe vers l'Indopacifique ont tourné l’attention des américains du Caucase du Sud; viennent s’ajouter les défis mondiaux et nationaux auxquels l’administration Biden est confrontée, à commencer par l’économie, la justice raciale et le changement climatique. Ce désengagement mène à un déclin de l’intérêt de l’OTAN pour la région, même si l’offre d’une adhésion de la Géorgie à l’Alliance atlantique demeure un projet sur papier. La Géorgie, pour sa part, projette ça motivation à s’intégrer au sein de la communauté transatlantique, symbole du prix de consolation, car elle abrite un centre de formation de l’OTAN à l’extérieur de Tbilissi. L’accord d’association UE-Géorgie, qui définit une zone de libre-échange approfondie, les liens économiques avec l’UE n’a pas permis de réduire le taux élevés de pauvreté, le chômage et de sous-emploi. Devant ce manque de coordination, les pays occidentaux peinent à trouver un rôle pour le groupe de Minsk. A travers ce verrouillage tout azimut, le défi des acteurs caucasiens est de trouver une façon d’attirer l’attention des chancelleries occidentales, et la mise en place d’une conférence internationale pour la construction de la région, allant même par un plan Marshall pour le Caucase.

LES NOUVELLES LIENS DE LA TURQUIE, L’IRAN ET LES MONARCHIES DU GOLFE

La Turquie et l’Iran, cherchent activement à se servir afin de pousser loin leurs ambitions de diversifier leurs rapports extérieurs. La Turquie malgré sont engagement avec ses voisins orientaux, a adopté une politique étrangère plus affirmée et orienté vers l’Est, les efforts d’Ankara pour promouvoir un vaste programme à travers l’Eurasie se sont avérés très limités, sauf en Azerbaïdjan. Bien que la Russie soit réticente à ce que la Turquie bénéficie d’un mandat régional plus large, la capacité de cette dernière à se tailler une place dans le Caucase est un fait accompli avec lequel elle doit désormais composer. Au-delà de cette dimension sécuritaire, l’enracinement de l’influence turque s’observe aussi sur le plan économique. Enfin, la Turquie est devenue une destination essentielle, juste après la Russie, pour les travailleurs migrants du Caucase, y compris les Arméniens. L’Iran n’est pas en reste et parvient à accroître son influence dans la région, étant devenu le premier marché pour les exportations azerbaïdjanaise et arméniennes. Les deux nouveaux acteurs, visent aussi la construction d’infrastructures de transport vers le Sud pour exploiter les marchés plus larges du Golfe, en passant, par l’Iran. Au fil du temps et les rapports de force tumultueuses et les transissions géopolitiques, le Caucase du Sud redécouvre sa géographie historique en tant que région aux multiples voisins influents. L’affaiblissement de l’influence russe en conjonction avec un désengagement des partenaires occidentaux a laissé un rang vide qui a encouragé les dirigeants de la région à consolider ou à bâtir de relations qui lient plus étroitement le Caucase au Moyen-Orient, au golfe Persique, a la Méditerranée et à l’Asie. Pour les trois États, cette intégration régionale est une évolution positive. N’étant plus réduit à une simple croissance isolé de l ‘ex-Union soviétique, le Caucase du Sud interagit avec une région plus vaste que son espace confiné. Ces nouvelles connexions extrarégionales sont susceptibles de durer, voire de s’accroître quand les nouvelles infrastructures de communication et de transport promises au lendemain de la guerre du Karabagh seront opérationnelles. Cette tendance n’inquiète guère les décideurs occidentaux, même s’ils ne sont pas prêts à complètement délaisser leur influence au Caucase du Sud. Du coté de la Russie, elle assiste toutefois à un effritement de son influence au Caucase, tendance qui s’observe depuis quelques années, mais qui semble accélérer et l’hégémonie Poutinienne.

Un an après la fin du récent épisode de la guerre du Haut-Karabagh, disputé entre l’Arménie e l’Azerbaïdjan en 2020, il est approprié de réexaminer l’équilibre géopolitique du Caucase. Si trois décennies après l’effondrement de l’URSS, les frontières géopolitiques qui manquaient autrefois ses anciennes républiques s’estompent, et que les puissances régionales deviennent plus influentes. Mais il n’est pas probable que les acteurs du Caucase puissent s’attendre à un regain d’intérêt de la part de Washington. Pour le moment, les intentions des États-Unis s’oriente vers l'Indopacifique afin de répondre à la montée en puissance de la Chine

MOHAMMED CHÉRIF BOUHOUYA




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