vendredi 15 avril 2022

GEOPOLITIQUE/ LES MONARCHIES DU GOLFE, LA RUSSIE ET LA CHINE: DEDOLORISATION ET LE BASCULEMENT DE LA PUISSANCE

Le thème de la puissance est au cœur de la réflexion sur les relations internationales, ces dernières étant avant tout des relations de puissance et le reflet de rapports de force. La politique internationale, reste avant tous un combat pour la puissance. Il s’agit de l’aptitude à exercer une coercition, à infliger un dommage aux autres par la menace ou l’usage de la violence et imposer sa volonté par la force, la menace et l’influence politique. La puissance n’est pas stable mais évolutive. La Chine devrait être la prochaine. La puissance d’aujourd’hui, quelle soit sa maîtrise des affaires du monde, ne peut être assurée de la pérennité de sa suprématie. Le retour des pétromonarchies du Golfe dans le giron de la Chine, apparaît comme le principal interlocuteur aux yeux des monarques de la Péninsule.


La Chine affirme sa présence au Proche-Orient et fait désormais entendre sa voix sur les grands dossiers stratégiques par son statut de membre permanent du Conseil de sécurité. Les Chinois font également une cour assidue au continent africain. Hu Jintao s’est rendu dans dix-huit pays africains en dix ans. Son successeur, Xi Jinping, à réservé au continent sa première visite officielle. Les échanges économiques sont passés de 12 milliards de dollars en 2000 à 55 milliards en 2006, et à 200 milliards en 2016. Les parts de marché de la Chine en Afrique ont bondi de 3% en 2001 à 18% actuellement. Pékin est avide des matières premières du continent. Sa présence est bien perçue, elle offre des alternatives . la présence occidental, est parfois jugée trop pressante. En 2018, se tenait un sommet Chine-Afrique. Plusieurs dizaines de chefs d’États africains y assistaient, comme il était d’usage auparavant lors des sommets France-Afrique. Xi Jinping promettait 60 milliards de dollars d’investissement nouveaux sur le continent. Le modèle de croissance de la Chine impressionne les leaders africains. De surcroît, Pékin prône la non-ingérence dans les affaires intérieures, contrairement aux Occidentaux. La Chine a également ouvert une base militaire à Djibouti, première base militaire chinoise hors de ses frontières, et a construit même des lignes ferroviaires Djibouti Addis Abeba et Mombassa- Nairobi. La Chine est devenue le premier bailleur de fonds des États africains, qui commencent cependant à avoir peur d’un néocolonialisme chinois, de relations bilatérales inégales, de l’invasion de leur marché par des produits chinois et du pillage de leur matières premières. Elle développe aussi de fortes relations avec l’Amérique Latine, là aussi à la recherche de matières premières. En somme, elle s’assure une présence diplomatique à l’échelle mondiale. De plus, sa politique de non-ingérence lui permet de développer des relations économiques avec l’ensemble des régimes dictatoriaux. Après sa reconduction à la tête de la Chine en 2018, l’ambition de Xi Jinping et de voir la Chine devenir la première puissance mondiale. Il renforce son pouvoir personnel et met fin à la limitation à deux mandats de 5 ans à la direction du Parti communiste chinois. Il resserre le contrôle sur la population et poursuit une offensive diplomatique, bénéficiant du retrait américains de la scène internationale sous Donald Trump. Sur 15 organisations internationales du systèmes onusien, 4 sont dirigées par les Chinois.

LA CHINE ET LES ETATS-UNIS



La Chine reste dépendante du marché américain. Elle reconvertit ses excédent commerciaux avec plus de 300 milliards de dollars par an, soutenant ainsi indirectement les valeurs du dollars américain. Si Pékin soldait ses avoirs américains, le dollar s’effondrait. Économiquement, la Chine et les américains ont donc partie liée, mais pas pour longtemps? Jusqu’en 2016, les relations économiques entre les deux puissances étaient plus étroites et les relations stratégiques sont très conflictuelles du fait de la montée en puissance de Pékin en mer de Chine. Les exportations chinoises vers les États-Unis sont quatre fois supérieures à celles des États-Unis vers la Chine. Afin de qualifier la relation sino-américaine, deux thèses contradictoires circulent. Celle du G2 ou celle d’une nouvelle guerre froide qui opposerait désormais Pékin et Washington. Les deux sont erronées. L’idée d’un G2 qui dirigerait les affaires mondiales est une démarque de l’ancien blog soviético-américain que déconnaient violemment la France et la Chine durant la guerre froide, relayées par de nombreux pays du Sud. Un G2 sino-américain qui gérerait les affaires du monde est impossible pour deux raisons: la première est que la relation sino-américaines est faite de coopération, mais aussi de rivalités et qu’ils sont loin d’avoir des intérêts commun qui les opposeraient à l’ensemble des autres nations. La seconde est que dans un monde globalisé, un G2 est tout aussi illusoire qu’un monde unipolaire. D’un point de vue américain, et plus précisément selon les stratèges de la maison blanche, la Chine n’est pas à la tête d’une alliance mondiale avec des bases militaires sur l’ensemble des continents qui ferreraient face au dispositif stratégique des États-Unis et de ses alliés. Pékin, qui tient encore a la doctrine Maoïste n’a pas un modèle alternatif à proposer au modèle américain fortement démocratique. Si il n’y a pas une compétition idéologique entre les deux puissances, le question n’est plus de savoir si la Chine va dépasser les États-Unis en terme économique et militaire, mais quand elle le fera? La réponse de cette question et la nouvelle alliance entre les pétromonarchies du Golfe, le BRICS et la Chine?

LE COMPLOT DE LA CHINE ET LES PÉTROMONARCHIES DU GOLFE CONTRE LES AMÉRICAINS

La Chine est un pays énergivore, au point qu’elle ne pourra sans doute pas tenir ses engagements de devenir une économie décarbonée. L’Iran comme les Saoudiens, qui sont les deux grands fournisseurs de la Chine, en sont conscients et comprennent bien quelle manne financière représente cet appétit chinois. Bien qu’antagonistes, ces deux pays accueillent le projet des nouvelles routes de la soie mis en place depuis 2013. En revanche, la fascination qu’exerce la Chine sur les élites de ces régimes est réelle, en raison de ses performances économiques, du modèle alternatif que le géant asiatique incarne vis-à-vis de l’Occident aussi, même s’il convient d’avoir depuis le Covid 19 un jugement plus nuancé à ce sujet. La Chine semble s’être accentué après la signature des accords commerciaux sino-iraniens à Téhéran en 2021, qui ont provoqué une inquiétude des Iraniens de se voir dépossédé de leur richesses naturelles, voire de leur souveraineté. Du coté Saoudien, on sait que les relations avec Washington sont plus anciennes qu’avec Pékin et, Riyad ne peut se permettre de s’aliéner la puissance américaine au risque de prêter le flanc d’une manière périlleuse à son turbulent voisin iranien. Cependant, avec le conflit Ukrainien, le poids de la Russie, la Chine et même le BRICS , les pétromonarchies du Golfe changent d’allié et tombent dans le bras de la Chine et ses alliées. La tentation chinoise dans la Péninsule arabique ne doit pas être sous-estimé. Elle s’exerce partout dans la région, à commencer par les monarques du Golfe, qui relève d’un hard power à large spectre. Toutefois, sur le plan stratégique, les américains sont encore en position dominante. De manière générale, ce qui prévaut, c’est un découplage entre enjeux économiques d’une part, et les enjeux stratégiques de l’autre. Le risque pour l’OTAN est qu’à terme se constitue un glacis eurasien, qui verrait Russes, les monarchies du Golfe, Chinois se partager des aires d’influence, et dont les nouvelles routes de la soie seraient l’élément précurseur. Afin de mettre les chinois en confiance totale, l’Arabie-Saoudite, et les EAU ont obtenu l’expulsion de ressortissants Ouïghours résident en Égypte par le dictateur El-Sissi lors du forums sur la coopération sino-arabe, claqués sur le sommets Chine-Afrique, et qui avaient pour objectif de faciliter les échanges tant au niveau multilatérale qu’au niveau bilatéral. Durant le régime fondé par Mao Zedong ( 1893-1976), la communauté Ouïghours puis les Huis convertis à l’Islam ont longtemps été sollicités dans l’élaboration d’une diplomatie informelle mise en place par Pékin à l’égard des pays musulmans. Jusqu’au début des années 2000, cette présence musulmane et sa diversité ont servi de faire-valoir pour les chinois afin de développer des canaux de communication internationaux, et en prise directe avec le monde musulman. Urumqi, capitale du Xinjiang, située à 200 kilomètres du Kazakhstan, est aussi devenue une zone stratégique pour les hommes d’affaires centra-siatiques, même si la ville et sa région et moins attractive depuis que le génocide chinois contre les Ouïghours se sont accentuées avec la bénédiction des monarchies arabes. La province autonome du Ningxia, à proximité de la Mongolie, ou des villes plus à l’Est, comme Yiwu ou Canton, se sont ouvertes à des communautés maghrébines ou Sénégalaises; une stratégie de convertir les minorités musulmanes sunnites a une confrérie Soufis mourides. La province du Guangxi a, quant à elle, une coopération avec le sultanat de Brunei. La mondialisation opère dans les deux sens, et cette présence musulmane, même de courte durée, ne peut laisser indifférente la population chinoise. Du reste, elle n’est pas étrangère à un processus de conversions inédites par-rapport de l’Islam que le christianisme. En cela, Xi jinping et les communistes ont perdu leur pari. Loin d’être devenue une société athée, la Chine est profondément travaillée par le sentiment religieux. Malgré la complexité de l’Arabie-Saoudite, les EAU et même l’Iran, qui n’ont jamais dissimulé leurs mépris envers une communauté musulmane massacrée et ostracée, face aux milliards de dollars chinois. En revanche, que Pékin veuille faire davantage acte de présence et cordonner sur un vaste échelle ses initiatives diplomatique envers les monarques du Golfe et certains pays africains est une stratégie à long terme afin d’accélérer le déclin de la puissance américaines. Les initiatives chinoises sont d’ailleurs coordonnées par un envoyé spécial pour le Moyen-Orient ( Zhai Jun ), diplomate chevronné, arabisant, ancien ambassadeur en France, lequel est la courroie de transmission entre l’ensemble des ambassadeurs chinois opérant sur la zone et Xi Jinping lui-même. Preuve s’il on est que le chef de l’État chinois accorde une priorité à cette région comme à ses prolongements géopolitique. Quand a l’Afrique, l’influence de la diplomatie chinoise concernant le suivi des investissements et la coopération tout azimuts, le jeu de l’ombre est réservé aux services secrets chinois qui veillent sur tous les fronts. La première mission des renseignements chinois est d’assurer à la Chine un maintien de ses approvisionnement énergétiques, mais aussi d’éviter que le monde musulman ( Monarchies du Golfe et continent Africain) ne soit impacté par l’essor des mouvements djihadistes. Sachant que la pénétration économique chinoise s’est accompagnée d’une présence humaine, avec un accroissement important de la communauté chinoise à plus de 70 000 en 2020.


Discrètes, les négociations entre les grands producteurs de pétrole de la planète sont fondamentalement pour le commerce international, les enjeux géopolitiques mondiaux et le prix de l’essence à la pompe. De l’Afrique au Golfe Persique, les hydrocarbures ont permis richesse et développement, transformant les sociétés, mais aussi, et surtout, créé dépendance et rente. Si ce système est remis en question, y compris en Arabie-Saoudite, il n’est pas si facile de changer, notamment lorsque la Chine s’impose comme le principal client de la région avec un seul objectif devenir la première puissance mondiale.

MOHAMMED CHÉRIF BOUHOUYA




La région la plus riche en brut

D’après le British Petroleum, la première puissance pétrolière du Moyen-Orient et du monde est l’Arabie-Saoudite, avec 297, 5 milliards de barils de réserves prouvées. Contrôlant le plus grand gisement de la planète, celui de Ghawar, elle a la capacité de pouvoir ouvrir ou fermer le robinet selon la demande, et ce à des coûts de production faibles, selon son brut étant propre. C’est ce qui la distingue du Venezuela, qui a les plus importantes réserves 303, 8 milliards de barils, mais doit engager des frais élevés pour traiter la matière première, sans oublier que le régime Al-Saoud fait figure de modèle de stabilité politique par rapport aux crises secouant Caracas. Aucune autre région que le Machrek ne possède une telle richesse en pétrole, avec 48,3% des réserves mondiales, tout ou presque étant concentré dans l’espace géographique de l’Arabie-Saoudite ( 17,2% ) de l’Iran ( 9,1% ) de l’Irak ( 8,4%) du Koweït 5,9%) et des Émirats arabes unis 5,6%. )




NB/  Dans les monarchies du Golfe, le pacte social a longtemps été de laisser le régime en place à condition qu’il sache gérer les revenus pétroliers pour le bien-être de ses administrés. Avec les nouvelles alliances entre les États-Unis l’Iran et Israël dans la région, et la question du nucléaire Iranien, les monarchies du Golfe pour leurs sécurités ils ont trouvés une autre puissance afin de garder leur monopole pétrolier et conserver leur règne monarchique face aux nouveaux défis qui s’obscurcissent à l’horizon.













2 commentaires:

  1. je suis fasciné par ta plume et j'adore la géopolitique.

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  2. Je t'ai déjà rencontré sur Nancy et nous avons conversé rue saint-nicolas a nancy.

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