vendredi 12 août 2022

 GÉOPOLITIQUE DE L’AFRIQUE / DES CHEFS D’ÉTATS PAR PROCURATION ET DES PEUPLES EN OTAGE

L’Afrique constituait la zone stratégique la plus déstabilisée de la planète. Marquée par des guerres civiles sans fin, des conflits ethniques permanents, des massacres de masse et même un génocide. Depuis 2012, 14 coups d’État ont eu lieu sur le continent : au Mali, en Égypte, en République Centrafrique, au Burkina Faso, au Tchad, en Guinée-Bissau, au Soudan, au Zimbabwe, en Guinée et d’autres suivront. On ne peut donc pas parler d’une flambée de putschs lorsque l’on remet ces chiffres en perspective. Si la forme n’est pas nouvelle, les derniers coups d’État annoncent des lendemains difficiles dans les pays où, par le passé, on s’est contenté de l’apparence de démocratie au-delà de la substance.


La fin de la compétition soviéto-américaine n’avait pas, mis fin aux conflits en Afrique. Elle est seulement venue réduire l’intérêt stratégique du continent. De fait, il était désormais inutile de courtiser les pays africains pour augmenter le nombre de pays amis ou alliés, ou pour empêcher le rival de gagner des positions stratégiques. Le dilemme, pour l’Afrique, n’était donc pas tellement d’être victime de la compétition internationale, mais bel et bien d’être abandonnée par le monde extérieur et la mondialisation. Depuis leurs indépendances, le continent n’a en fait jamais pu mettre en place le modèle de l’État-nation dont elle a voulu s’inspirer. Pendant des décennies, l’appareil d’État a été accaparé davantage par des fonctions que par des partis politiques, par des ethnies que par des groupes sociaux ou des juntes militaires. Les classes dirigeantes, loin de s’inspirer du modèle de l’État puissant, ont géré l’État comme s’il s’agissait de leur patrimoine personnel. C’est en fait un État prédateur qui s’est mis en place, les classes dirigeantes ne tenant leur statut et leur privilège que du bon vouloir d’un dirigeant suprême dictatorial, comme Mobutu au Zaïre, Bokassa en Centrafrique, Houphouet-Boigny en Cote d’Ivoire, el-Sissi en Égypte, au Tchad, en Mauritanie, au Niger, au Nigeria, au Maroc, au Burkina-Faso, le Ghana, le Congo, Sierra Leone, Burundi, Comores et autres. Ainsi, les infrastructures des pays africains se sont effondrées au point d’atteindre un niveau inférieur à celui avant l’indépendance, et la sous-alimentation, les maladies, les suicides, la corruption, et les mafias politico-financières frappes toujours 80% de la population. La richesse du continent en matières premières ( mines, or, diamants et pétrole ) n’avait pas engendré de réussite économique. Le PNB global de l’Afrique subsaharienne était équivalent à celui de la Belgique. Les exportations des pays africains avaient chuté de 60 milliards de dollars par an durant les années 1980, à 35 milliards dans les années 1990. De 3% du commerce mondial en 1960, l’Afrique ne représentait plus que 1% en 2000. Alors qu’elle comptabilisait 12% de la population mondiale, elle n’atteignait que 1,5% du PIB mondial. Les entreprises africaines, minées par la corruption, la mauvaise gestion, les nominations clientélistes, et les paradis fiscaux étaient incapables d’affronter la compétition internationale. L’agriculture de subsistance a laissé place aux cultures spécialisées, destinées à l’exportation. L’ouverture des marchés avait souvent signifié la mort des producteurs locaux, incapables de résister à la concurrence des multinationales. Quant aux matières premières, de facteur de richesse, elles se sont transformées en véritables sources de malédiction, dont le contrôle donne naissance à des guerres civiles. Alors que les technologies de l’information sont devenues la clé de voûte du développement économique, l’Afrique semblait exclue de la révolution numérique, au risque de se voir encore plus marginalisée. Lorsque même l’électricité ne fonctionne pas correctement, il est en effet très difficile de passer à Internet, sauf pour les dirigeants et leurs entourages. Le coût d’une connexion à Internet représente 140 à 250 dollars par mois, ce qui était hors de prix pour la plupart des Africains. Le niveau de vie était à un niveau plus faible que celui atteint au lendemain des indépendances. En 2015, les indicateurs de pauvreté y sont les plus élevés au monde. Ainsi, l’Afrique comprend 32 des 44 pays les moins avancés. Elle totalisait en outre, 190 millions de personnes sous-alimentées et 23 millions atteint du Sida. 
L’handicap majeur de l’Afrique est que la croissance est surtout le fait du renchérissement des matières premières. Elle n’est pas toujours inclusive, car la rente du pétrole ou des minerais est faiblement créatrice d’emplois et s’accommode assez bien de la corruption. Le continent fait ainsi face au risque de re-primarisation des économies, sorte d’anathème minière et pétrolière qui pourrait, à terme, entraîner une hausse de la fracture alimentaire. Si actuellement, 22 pays africains ont obtenu le statut des pays à revenu intermédiaire, environ 450 millions d’Africains vivent dans l’extrême pauvreté, soit un tiers de la population vivant avec moins de 2 dollars par jour. La population vulnérable continue d’augmenter du fait de la démographie, qui entrave la croissance économique. Les grandes problématiques de la mondialisation se situent en Afrique, qu’il s’agisse des migrants, des grande pandémies, de la démographie, l’environnement, le développement économique ou de l’accès aux matières premières. La Chine lance une offensive à la fois diplomatique et économique, voyant dans le continent un futur débouché pour ses produits et une source immédiate des matières premières. Les échanges commerciaux sont passés de 10 milliards en 2000 à prés de 210 en 2019. L’Afrique est la cible prioritaire du programme des nouvelles routes de la soie chinoise et fournit déjà un tiers de ses approvisionnement en pétrole. Les États-Unis y sont aussi à nouveau très actifs. Principalement sous l’angle des aspects pétroliers et de la lutte contre le terrorisme. Le Brésil enfin, s’intéresse aussi à cette région du monde : 17 nouvelles ambassades ont été ouvertes en Afrique au cours des deux mandats de Lula.

FRANCE AFRIQUE OU AFRIQUE FRANCE ?



La politique africaine de la France s’est intéressée, au cours des dernières décennies, à des thématiques et secteurs divers avec un objectif , rendre compétitive l’offre française en Afrique. En ce sens, deux facteurs explicatifs semblent pertinents pour tenter de comprendre les différentes polarisations et fragmentations qui ont conduit à la perte d’attractivité et de l’influence de l’offre française au sein du continent. Le premier facteur est certainement lié à la sociologie historique du politique qui permet d’expliquer comment la politique étrangère de la France en Afrique n’a pas su, voulu ou pu intégrer la maîtrise de l’historicité des sociétés africaines, du moins depuis les processus de formation des États jusqu’à leur insertion dans le système international. Le deuxième facteur, qui s’inscrit incontestablement dans la continuité du premier, peut être éminemment stratégique. La créativité française en matière de politique étrangère ne s’est pas montrée à la hauteur des grands enjeux stratégiques et des transformations géopolitiques et géoéconomiques qui s’opèrent sur le continent. Néanmoins, les importations françaises en provenance de la zone ont enregistrés une progression de 7,6 % à 1,1 milliards d’euros. Ces derniers proviennent à 73 % de la Cote d’Ivoire « troisième fournisseur en Afrique subsaharienne » et principalement composées de produits agricoles et agroalimentaires. Ainsi, la France voit son excédent commercial augmenter de 12,6% pour s’établir à , 3 milliards d’euros au niveau régional, dont 32% relèvent de la balance commerciale avec le Sénégal. En somme, les plus gros clients africains de la France en termes de valeur, se trouvent en Afrique du Nord. L’Algérie enregistre 4,9 milliards d’euros d’achats, le Maroc 4,75 milliards, 3,3 milliards pour la Tunisie et 2,3 milliards pour l’Égypte. L’Afrique du Sud, qui n’appartient pas à cette zone géographique, est aussi des plus gros clients avec une facture record de 5,2 milliards d’euros. En ce qui concerne les achats français, l’Afrique du Nord conserve la tête du classement avec le Maroc 5,5 milliards, juste après ces pays d’Afrique du Nord viennent des pays comme le Nigeria avec 3,7 milliards, la Libye 1,4 milliards et l’Afrique du Sud 1,3 milliards. Les exportations de la France vers les pays de l’UEMOA se chiffrent à 3,4 milliards d’euros en 2021, en hausse de 10,8 par rapport à 2020. Cela correspond à respectivement 7% et 35% des exportations de la France vers la CEDEAO pour 4,5 milliards d’euro et l’Afrique subsaharienne 9,8 milliards d’euro. Si l’on compare les deux principales sous-régions, zones traditionnelles de l’influence française, à savoir l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique centrale, les statistiques révèlent que les ventes vers les pays de l’UEMOA sont largement supérieures aux exportations vers les pays de la CEMAC avec 1,3 milliards d’euros, mais restent toutefois très loin des exportations françaises vers l’Afrique du Nord 13,3 milliards. En 2019, des pays comme le Burundi, la Guinée-Bissau, le Malawi, et le Soudan du Sud ne sont pas des partenaires commerciaux privilégiés de la France, mais ils enregistrent respectivement : 7,6 milliards d’euros d’achats et 3,3 milliards de ventes pour le Burundi 5,3 milliards d’achats et 0,3 milliards de ventes pour la Guinée-Bissau, 8,5 milliards d’achats et 3 milliards de ventes pour le Malawi, 3,5 milliards d’achats et 0,2 milliards de ventes pour le Soudan du Sud. En cumulé, la France a vendu en 2019 environ 29,5 milliards d’euros de biens et services à l’Afrique et en a acheté pour 26 milliards d’euros. Dans le cadre du poids économique de la France face à la compétition géopolitique en Afrique, il est évident que les intérêts français sont devenus contrastés. La part du marché relative tenue par la France sur le continent africain a rapidement décliné, passant de 15 à 7,5% entre 2000 et 2020, la France a vu, en quinze ans, sa part de marché tomber de 11 % à 5,5 % en Afrique. La Chine est le principal acteur qui a occupé le champ laissé par la France e l’Europe. En moins de vingt ans, la Chine est devenue le premier partenaire commercial du continent avec 114 milliards de dollars d’échanges en 2016. Ce sont plus de 2500 entreprises chinoises qui sont implantées en Afrique pour principalement combler le déficit en infrastructures et accélérer le développement économique du continent. Pékin a prêté un total de 125 milliards de dollars à l’Afrique en l’espace de quinze ans. Elle se tient en tête avec plus de 27% des parts de marché sur le continent, qui se combinent à plus de 80 milliards de dollars d’investissements directs et 150 milliards accordés en prêts de 2001 à 2022. L’Inde parvient à se trouver une place sans cesse croissante dans cette compétition. Les Émirats arabes unis, qui occupaient le second rang au palmarès derrière la Chine, se sont contentés d’un montant de 15 milliards de dollars d’investissement en Afrique. L’Italie pour ça part a cumulé 11,6 milliards de dollars entre 2015 et 2016. Dans ce classement, la France avait été reléguée au sixième rang. Concernant la Turquie, le volume des échanges a été multiplié par cinq en vint ans, passant de 5,4 milliards à 25,4 milliards de dollars en 2020. Au cours du derniers sommet Turquie-Afrique en 2021, le président Turque s’est fixé l’objectif de 75 milliards de dollars d’investissement. Les secteurs sur lesquels la France trouvera certainement une importante rivalité turque sont : le commerce et les investissements, la paix, la sécurité, la gouvernance ; l’éducation, les jeunesse, les droits des femmes, les infrastructures, l’agriculture, la santé , l’armement et la culture, selon le mémorandum d’accord signé entre la Turquie et les pays africains pour la période 2022-2026. Au niveau européen, l’Allemagne est un concurrent farouche de la France, elle réussit à être au coude-à-coude avec la France dans la pénétration du marché africain. Les Pays-Bas, ils ont dépassé la France en matière d’investissements directs.

DÉCLASSEMENT STRATÉGIQUE ET LE SENTIMENT ANTI-FRANCAIS EN AFRIQUE


La dégradation du cadre sécuritaire européen, couplée à la militarisation croissante de la Chine en Indopacifique, questionne la posture expéditionnaire de la France sur le continent. La nécessaire redéfinition des priorités stratégiques de l’Hexagone à l’échelle internationale vient désormais s’ajouter la question de l’acceptabilité politique et sociétale de la présence militaire française en Afrique. La succession de coup d’État au Mali, au Tchad et au Burkina Faso impose à la France de coopérer avec des régimes militaires, recourant parfois à des milices privées à l’instar de la société russe «Wagner» actuellement présente au Mali. Au-delà de cette contrainte d’ordre politique, un sentiment anti-français se diffuse au sein des sociétés africaines, que ce soit dans les médias, sur les réseaux sociaux ou dans la rue, comme l’illustrent les récentes manifestations organisées à Bamako, Niamey et Ouagadougou. Suite à la dégradation du contexte international et régional, le renouvellement de la compétition de puissance en Afrique, dont témoigne l’influence croissante de la Russie, de la Turquie et de la Chine, accroît le risque d’un déclassement stratégique des puissances occidentales. Les 3100 militaires Français déployés en permanence sur le continent africain participent à la protection des ressortissants et à la défense des intérêts Français, contribuant à la prévention des crises, renforçant la coopération régionale et se tiennent prêts à appuyer d’éventuels déploiements opérationnels. Les 350 militaires à Dakar, appelés éléments Français au Sénégal ( EFS), constituent un pole opérationnel de coopération ( POC) à vocation régionale. S’inscrivant dans une posture de prévention, les EFS remplissent les missions suivantes : assurer une veille opérationnelle dans la zone de responsabilité permanente ( ZRP), couvrant ainsi les 15 pays de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest ( CEDEAO) et la Mauritanie ; mettre en œuvre les accords de coopération militaire bilatérale dans le cadre du traité de partenariat de défense signé avec le Sénégal en 2013, et appuyer les Etats africains de la ZRP dans le renforcement de leur sécurité collective. A ce titre, les EFS participent à la préparation opérationnelle des unités françaises en zone semi-désertique et soutiennent enfin, dans la durée les unités projetées dans la région en cas de conflit. La France déploie aussi des forces armées au Gabon depuis l’indépendance du pays en 1960, conformément aux accords de défense signés la même année. Second pole opérationnel de coopération à vocation régional avec Dakar, les EFG constituent un point d’appui opérationnel et logistique sur la façade ouest-africaine. Ils sont donc en capacité d’accueillir les troupes et le matériel envoyé en renfort dés lors que la situation sécuritaire le nécessite. La zone de responsabilité permanente des EFG englobe les 11 Etats de la Communauté économique des Etats de l’Afrique centrale ( CEEAC). La coopération opérationnelle s’inscrit en cohérence avec le programme de renforcement des capacités africaines de maintien de la paix ( RECAMP). La présence des forces françaises sur le territoire djiboutien avec 1500 militaires, sont en mesure de projeter rapidement des effectifs en cas de crise dans le sous-région, vers l’océan Indien ou le Moyen-Orient. Les FFDJ sont régulièrement engagées dans des missions de sécurité civile en Asie du Sud-Est ( opération Béryx), de lutte contre la piraterie ou encore dans la cadre de l’opération ( Licorne) en Cote d’Ivoire, en République centrafricaine, Sangaris et Barkhane. En 2017, la Chine ouvre officiellement à Djibouti sa première base militaire permanente à Djibouti afin de faciliter la logistique tout en mettant en avant la protection de ses ressortissants et le soutien dans la lutte antipiraterie. Ainsi, depuis 2002, l’US Army dispose à Djibouti de sa seule emprise militaire permanente en Afrique, le Camp Lemonnier, qui compte 4000 hommes. Ainsi, les bases avancées constituent encore les tètes de pont d’une puissance en projection mais se heurtent à une concurrence accrue émanant notamment de la Russie, de la Chine et de la Turquie. La France cherche actuellement à élargir sa palette d’outils de gestion de crise en intégrant des mesures plus larges que le volet militaire, visant essentiellement l’économie, la culture, l’éducation, la santé, la diplomatie afin de tarir progressivement les sources de recrutement des groupes armés.

LE DECHAINEMENT ANTI-FRANCAIS EN AFRIQUE



Dans l’ancienne Afrique occidentale française, l’un des premiers foyers de contestation idéologique fut la Haute-Volta ( actuellement le Burkina Faso) à partir de 1983. Les concepts d’anticolonialisme et d’anti-impérialisme furent popularisés par Thomas Sankara. Après avoir pris le pouvoir à Ouagadougou, il entreprit des réformes de font qui révolutionnèrent le pays, grâce à une jeunesse qui rapidement quadrille le pays. Moins de vingt ans plus tard, c’est en Cote d’Ivoire qu’ont éclate des manifestations anti-française. Elles ont débutés avant l’arrivée au pouvoir de Laurent Gbagbo. En 2000, les jeunes patriotes de la FESCI et de Charles Blé Goudé avaient apporté leur soutien au général putschiste Robert Guei en assiégeant l’ambassade de France. Les années 2003-2004 ont été marquées par un déchainement anti-français paroxystique, avec le fameux slogan de Charles Blé Goudé ( A chaque Ivoirien son Français) et surtout l’assassinat du journaliste de RFI, victime d’une compagne qui visait explicitement la  française. Début mars 2021, à Dakar, le ressentiment anti-français a pris une autre tournure : se sont les intérêts économiques Françaises qui ont été visés, et même pillés. En 2021, des manifestations très violentes au Sahel ont visées la présence française de Barkhane : blocages de convois militaires à Kaya ( Burkina Faso) le 18 novembre 2021, à Téra ( Niger) le 27 novembre 2021, à Ansongo ( Mali) le 20 janvier 2022. A chaque fois des centaines des milliers de manifestants, criant « Abas Barkhane, à bas la France » et parfois « Vive la coopération Mali-Russie ». Ces heurts violents, qui ont fait plusieurs victimes, comme à Téra. Une relecture attentive de ces évènements laisse transparaitre, un soubassement idéologique relativement cohérent : la critique marxiste du néocolonialisme est clairement exprimée, parfois teinté de panafricanisme, émerge à fleur de peau en Cote d’Ivoire ; la dénonciation des intérêts Français éclate au Sénégal ; la condamnation des ingérences militaires françaises est exacerbée au Sahel. Mais la montée des tensions est probablement le fruit d’une frustration et une puissance de conviction liées à des puissances étrangères « selon certains analystes ». Enfin, les interventions militaires françaises, notamment en Cote d’Ivoire, ou en Libye, puis au Mali et en Centrafrique, se poursuivaient malgré les affirmations sur l’abandon de la Franc- Afrique. La politique africaine d’Emmanuel Macron apparait bien comme une déclinaison. Il s’agit d’abord, de solder les conflits symboliques qui parasitent les relations entre la France et le continent. Toutefois, cette politique de désinflation polémique ne peut aller jusqu’à faire de la France un partenaire ordinaire de l’Afrique. La plus parfaite illustration de ce dernier point est la continuité des interventions militaires françaises d’un président à l’autre. C’est tout le paradoxe de la situation. Une attitude moderne, progressiste, qui ne peut se déployer que parce qu’il y a un héritage colonial et néocolonial donnant à la France une position tutélaire forcément asymétrique. On peut la formuler, d’une présidence à l’autre, la rééquilibrer, mais le substrat demeure, car il est impossible de s’extirper de l’histoire contemporaine. La marge laissée au changement réside dans la manière de faire et dans la reformulation symbolique. De ce point de vue, Emmanuel Macron a fait du mieux pour les intérêts de la France.


A une relation verticale, traditionnellement tournée en direction des élites dirigeantes du continent, Emmanuel Macron substitue une relation horizontale adressée à la société civile. Pas de tabous sur les questions postcoloniales, pas de langue de bois sur l’éternelle continuité de liens qui existent entre la France et l’Afrique, pas de condescendance morale sur la responsabilité de la France vis-à-vis de l’avenir du continent. Le président Français sait très bien quels écueils communicationnels il doit éviter afin de réussir son entrée sur la scène africaine. Sachant que souveraineté et ingérence sont deux principes antagonistes. Ils sont tous deux évoqués comme des principes protecteurs, des Etats plus vulnérables contre les appétits de grandes puissances pour le premier, des peuples contre les tyrans pour le second. Le débat n'est pas dépourvu d'arrière-pensées stratégiques. 


MOHAMMED CHERIF BOUHOUYA


L'Afrique est mal partie. Quarante ans plus tard, l'avenir semblait lui avoir donné raison. Mais depuis le début du XXI siècle, l'Afrique est entrée de plain-pied dans la mondialisation. Attractive pour les puissances extérieures, en dix ans, le volume du commerce des pays émergents a doublé, pour représenter 37% du total du commerce extérieur du continent. Cela lui permet de sortir d'un tête-à-tête encombrant et totalitaire avec les ex-puissances coloniales ( France, Grande-Bretagne, Belgique, Italie et l'Espagne.) Le continent africain devrait connaitre la plus grande croissance démographique au niveau mondial pour atteindre 2 milliards d'habitants d'ici 2050. Paradoxalement,  le doux commerce entre les nations permet de pacifier leurs relations, l'effet naturel du commerce est de porter à la paix. Mais avec l'implication directe des puissances comme la Chine, la Russie, l'Inde, l'UE, et les Etats-Unis, l'Afrique risque d'être le continent le plus déstabilisé du monde dans les décennies à venir. 











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