GÉOPOLITIQUE/ CHINE : VERS UN NOUVEL ORDRE FINANCIER MONDIAL ET LA FIN DU LEADERSHIP AMÉRICAIN
Moins d’une
décennie, la Chine lançait la Banque d’investissement pour les infrastructures (AIIB).
Cette nouvelle Banque mondiale, fortement
soutenue par 57 Etats, a mis la Chine sur les devants de la scène
internationale en matière d’une émergence d’un nouvel ordre financier mondial. Bien
que le succès de l’AIIB ait isolé les Etats-Unis, ils gardent une influence majeure
grâce au partenariat transpacifique (TPP), qui fixe les basses d’une zone de
libre-échange entre les économies des régions Asie et Pacifique.
De
nombreux pays européens, dont la France, et après le ralliement du Royaume-Unis
à l’AIIB début mars 2015, les décideurs Européens ont décidé d’en devenir membres,
malgré les sanctions répétitives de Washington. Seize puissances du G20 ont
rallié la nouvelle Banque d’investissement. Les grands absents de cette
coalition financière, l’Amérique du Nord (Etats-Unis, Canada, Mexique et le
Japon), dont leurs réserves se portent sur des objections stratégiques. Le rôle
de la nouvelle institution sera de financer la construction d’infrastructures
de transports, d’énergie, de réseaux de télécommunication en Asie afin de
maintenir son rythme de développement. Les besoins de financement d’infrastructures
y sont important, de l’ordre de 800 milliards de dollars par an et l’aide de la
Banque mondiale et Asiatique de développement (BAD) n’est pas suffisante, d’où
le capital total s’élève respectivement à 223 milliards et 160 milliards de dollars.
La puissance financière Chinoise, avec sa réserve de change d’environ 5000
milliards de dollars, s’impose comme un acteur de premier plan, cherchant à
soutenir le développement régional non seulement pour les besoins de son
économie, mais également pour ses ambitions géopolitiques et géostratégiques. Les
bénéfices de cette banque pour Pékin sont pluriels. Économiquement, l’AIIB est
une manne d’opportunité pour ses routes d’exportations et ses sociétés de BTP. Financièrement,
le développement de cette banque va de pair avec l’internationalisation du « Yuan »
et l’augmentation du rendement de ses réserves financières. Sur le plan stratégique,
l’organisation lui permet de structurer en sa faveur l’ordre régional en matière économique et financière afin de diminuer l’influence du Japon et des
Etats-Unis et contribuer essentiellement à un système financier multipolaire,
dominé depuis les accords de « Bretton Woods 1944 » par les Américains
et l’Europe. Avec un capital de départ de 100 milliards de dollars, dont prés
de la moitié financée par la Chine, certains pays Asiatiques, comme l’Inde, l’Indonésie,
et la Malaisie, craignent que l’AIIB ne serve de moyen de pression politique de
la part de Pékin. Du coté du vieux Continent, l’enthousiasme économique domine
avec la perspective de nouveaux contrats et le renforcement de leur présence
dans la zone la plus dynamique de la planète.
INDE/ CHINE : FASCINATION ET PRAGMATISME ECONOMIQUE
Le modèle économique Chinois est regardé avec grande attention à New Delhi, en particulier pour ça capacité à développer des infrastructures et à gérer la question urbaine, deux problématiques très observées avec acuité en Inde, ou les routes restent très mauvaises et l’exode rural fera arriver dans les villes plus de 260 millions de personnes d’ici à 2040. Cette nécessité explique le boom des échanges commerciaux entre les deux géants asiatique, dont ils ressemblent environ 2,61 milliards d’habitants : de 4,9 milliards de dollars en 2003, ils sont passés à 18,9 milliards en 2007 et à 70,8 milliards en 2015. Au même moment, dans le « Ladakh », des militaires chinois pénétrant en territoire Indien, réveillant les tensions entre les gouvernements et illustrant donc le paradoxe des relations Sino-indiennes : décidées à renforcer leurs coopérations, les deux géants voient aussi les motifs de compétition augmenter. Du coté Indien, on a besoin de la Chine, tout en s’inquiétant de son avancée dans l’Océan Indien. Du coté Chinois, on ne craint que de façon limitée les ambitions Indiennes, car la Chine reste la première puissance économique et militaire de la région avec un budget de la défense de 140 milliards de dollars et 2,29 millions de soldats contre 38,6 milliards et 1,32 millions pour l’Inde. Si la rencontre entre Modi et Xi Jinping a abouti à la signature de 21 accords commerciaux et de coopération pour un total de 22 milliards de dollars, elle intervient dans un contexte diplomatique illustrant les rivalités entre les deux puissances asiatiques. De l’autre coté au Pakistan, le président chinois a débloqué 46 milliards de dollars d’investissement, cela ne peut être que positif pour l’Inde, l’ennemi historique de toujours devient malgré lui la clé d’une stabilité régionale. Alors que la chine affirme sa puissance dans l’océan Indien, en s’appuyant notamment sur le Pakistan et l’Inde, l’océan indien, cœur des grandes routes commerciales mondiales entre l’Europe, l’Afrique et l’Asie, est le théâtre des jeux d’influences entre l’Inde et la Chine. Toutefois, les différends territoriaux continuent de générer de la méfiance de chaque coté de la frontière. Pendant que l’Inde était concentrée à gérer ses relations avec ses voisins directs, surtout le Pakistan et le Bangladesh, elle en a oublié d’affirmer sa puissance dans l’océan Indien, alors qu’elle dispose de 7000 kilomètres de cotes et d’un commandement interarmées à « Port Blair », sur les iles Andaman. La Chine en a profité pour s’installer dans les pays riverains, avec des infrastructures portuaires depuis la Thaïlande jusqu’aux Seychelles, archipel où l’utilisation d’une base de ravitaillement pour ses navires chargés de la lutte contre la piraterie est en discutions permanente.
Le Pakistan, avec le port de Gwadar, est un maillon essentiel de cette vision stratégique et doit accueillir un corridor économique ouvrant la Chine aux eaux de la mer d’Oman. Ce partenariat est aussi vu comme la volonté de Pékin d’être un acteur politique régional de poids, notamment dans la question Afghane, terrain traditionnellement réservé à l’Inde. Celle-ci ne souhaite toutefois pas se fâcher avec sa puissance voisine, qu’elle regarde avec une grande fascination.
MOHAMMED
CHERIF BOUHOUYA
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