Le 10 août 1920, le traité de Sèvres prévoit le démembrement de l’empire Ottoman, sorti
vaincu de la première guerre mondiale et soumis à de fortes tensions inférieures.
Le texte évoque une autonomie Kurde dans la région de « Diyarbakir »,
sans préciser la nature exacte. L’année précédente, lors de la conférence de
paix de Paris, une délégation Kurde avait proposé une délimitation territoriale
beaucoup plus grande, incluant la majorité des territoires peuplés par des
Kurdes, en Turquie donc, mais aussi en Syrie, en Iran et en Irak. l'ambiguïté est levée avec le traité de Lausanne qui, le 24 juillet 1923, précise les frontières
modernes de la Turquie sans faire figurer le Kurdistan, tandis que les zones
Kurdes en Syrie et en Irak restent sous mandat Français Britannique.
Ce peuple
reste à jamais marqué par la trahison des puissances colonisatrices et portant,
il est présent dans cette région d’Asie depuis des siècles. Les discours
nationalistes retiennent le royaume de Mèdes « VII et VI siècles avant J-C »
comme époque fondatrice. Islamisés dés le VII siècle, les Kurdes obéissent à un
système tribal, avec de grandes familles, comme les Barzani dans le nord de l’Irak
ou les Berazi dans le sud de la Turquie et le nord de la Syrie. Dés les
premiers siècles de l’Islam, les Kurdes s’illustrent comme des guerriers hors
pair, soutenant les Empires Omeyyade ( 661-750), Abbasside ( 750-1258), puis Ottoman
( 1299-1923). L’un des grandes figures
de l’histoire du Moyen-Orient et surtout celle des Croisades chrétiennes en
Palestine, es un Kurde, « Saladin 1138-1193 ».
NATIONALISMES, CONSPIRATIONNISME ET INGÉRENCE
Le nationalisme
Kurde voie le jour au début du XX siècle. C’est alors que commence une longue
période de répression et de négation dans les différents Etats, poussant les Kurdes à inscrire leur lutte armée et
politique dans des cadres nationaux existants. Le GRK, en Irak, en es l’expression
la plus aboutie. Son président, Massoud
Barzani, en fonction depuis 2005 avec l’appuie des américains, est ainsi l’héritier
d’une lignée de combattants trouvant leurs origines dans l’éphémère République
de « Mahabad ». Fils de
Mustafa Barzani (1903- 1979), qui fut ministre de la défense de cette entité
avant de prendre le maquis dans le nord de l’Irak, ou il fonda le Parti
démocratique du Kurdistan « PDK » en 1946. Dés 1975, les relations
avec Bagdad ne s’apaisent pas est le nord du pays est soumis à une répression meurtrière
par les forces de Saddam (1979-2003). En mars 1988, l’armée Irakienne attaque à
l’arme chimique la ville de Halabja, causant la mort de 5000 personnes. Ainsi,
la répression des Kurdes par les Etats centraux amène à une solidarité
transnationale, avec des soutiens logistiques entre mouvements de guérilla et
puissances étrangères. En 1978, les revendications politiques prennent le
chemin des armes. Fondé par Abdullah Ocalan, le Parti des travailleurs du
Kurdistan (PKK) adopte la lutte armée contre l’Etat Turc six ans plus tard. Toutefois,
les différents entre partis Kurdes sont nombreux, ayant conduit à de véritables
guerres civiles, comme entre le PDK et l’UPK, laissant la place au spectre de l’ingérence
et les lobbies de plusieurs pays. Sachant, que le PDK conserve toujours son
fief à Erbil et à Dohouk, l’UPK quant à lui, il reste le maître incontestable
de Souleimaniye.
Considéré
comme une organisation terroriste par la Turquie, l’Irak, l’Union-européenne et
les Etats-Unis, ces derniers entretiennent des bonnes relations avec le PDK et
le gouvernement d’Erbil. En Syrie, les forces politiques et militaires issues
du PKK, revendiquent une gestion locale de trois cantons formant le Rojava le
long de la frontière avec la Turquie : Afryn à l’Ouest, Kobané au Centre
et Djézireh à l’Est. L’indépendance de facto du Gouvernement régional du GRK,
en Irak, fait des émules dans une région en crise. Le Moyen-Orient va-t-il voir naître un grand Kurdistan souverain ou des entités Kurdes autonomes au sein des
Etats existants ?
MOHAMMED
CHERIF BOUHOUYA
Repères historiques
Le Royaume-Uni et la France obtiennent des « mandats »
sur les nouveaux États nés après guerre : le premier sur l’Irak et la
Palestine, la seconde sur la Syrie et le Liban, sans aucun respect des droits
des peuples, dont le peuple kurde, à l’autodétermination.
En 1925, la province kurde de Mossoul, riche en pétrole, est
incluse dans l’Irak, placée sous mandat britannique. Le pays des Kurdes est
alors réparti dans quatre États : Turquie, Iran, Irak et Syrie. Si le
peuple kurde revendique son indépendance, ses luttes en ce sens et les
organisations dont il se dote seront liées à la situation spécifique dans
chacun de ces États.
— En
Iran
Dès 1946, les Kurdes d’Iran (6 à 7 millions de personnes soit 8 à
10 % de la population), proclament en 1946 la République de Mahabad,
avec l’appui de l’Union soviétique. Mais elle est écrasée l’année suivante par
le régime du chah.
— En
Irak
Mustapha Barzani, chef historique du mouvement national kurde,
obtient en 1974 la reconnaissance de l’autonomie des Kurdes (5 millions de personnes
soit 20 % de la population) après une insurrection armée. Mais Saddam
Hussein ne respecte pas la loi et, contre toute velléité indépendantiste, la
répression est massive et violente. Ainsi des bombardements aux gaz chimiques
de la ville kurde d’Halabja en 1988, faisant des dizaines de milliers de morts.
Lors des bombardements américains contre l’Irak en 1991, Kurdes et chiites sont
particulièrement ciblés par le régime. En 2003, les Kurdes soutiennent
l’invasion militaire de l’Irak par les États-Unis. À la faveur de ce conflit,
ils obtiennent une large autonomie, inscrite dans la Constitution irakienne de
2005. Toutefois, les tentatives d’instaurer l’indépendance à travers un
référendum à l’automne 2017 se sont heurtées à un refus de Bagdad et de toutes
les puissances régionales (à l’exception d’Israël). Jusqu’en octobre 2017 le
Kurdistan irakien était dirigé par le très conservateur Massoud Barzani, leader
du Parti démocratique du Kurdistan (PDK) en rivalité
avec l’Union patriotique du Kurdistan (UPK), fondé par
Jamal Talabani, récemment décédé. Depuis quelques années, un troisième parti,
Gorran (Mouvement pour le changement) s’est imposé sur la scène politique.
— En Turquie
La négation de l’identité du peuple kurde (15 millions de
personnes soit 20% de la population) est implacable. Depuis les années 1980, la
lutte entre la guérilla du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) et l’armée turque a fait plus de 40 000 morts. La région
du Kurdistan est placée sous état d’urgence. Mais les Kurdes participent aussi
au jeu politique et électoral. En juin 2015, le jeune parti pro-kurde, Parti
démocratique des peuples (HDP) obtient avec 13 %
des sièges un groupe d’élus au Parlement. Mais en novembre 2015, dans un climat
de quasi-guerre civile, lors de nouvelles élections, son score tombe à 11%.
Depuis la tentative de coup d’État par une partie de l’armée contre le
président Erdogan en juillet 2016, les responsables kurdes, comme une partie
des forces vives du pays, sont emprisonnés. Et ses élus ne siègent plus au Parlement.
— En
Syrie
Avec 2 millions de personnes (soit 9 %
de la population), les Kurdes représentent la minorité la plus importante du
pays, concentrée principalement au nord-est, mais aussi à Alep et à Damas.
Depuis la guerre menée par le pouvoir contre la volonté de démocratie de la
population syrienne, puis l’arrivée sur le territoire syrien de l’Organisation
de l’État islamique (OEI), les Kurdes du Parti de
l’union démocratique (PYD) ont adopté une stratégie
d’autodéfense et se sont trouvés en première ligne dans la lutte contre l’OEI. Le PYD, porteur d’un projet
politique intitulé « confédéralisme démocratique »
a proclamé l’autonomie de la région le Rojava qu’il a renommée Fédération du
nord de la Syrie . Par ailleurs, près de deux millions de Kurdes vivent en diaspora,
dont plus de la moitié en Europe.
Territoire d'environ 400 000 kilométrés carrés, le Kurdistan est un espace géographique à cheval sur différents Etats. En Turquie, la population Kurdes dépassent les 18,2 millions, en Syrie 1,94 millions, en Irak 7,18 millions, et en Iran 7,89 millions. Des minorités Kurdes sont installées en Arménie, en Azerbaïdjan, en Géorgie et au Turkménistan, sans oublier une diaspora d'environ un million de personnes, principalement installée en Allemagne. Cette population de 37 million ne sont ni Arabe, ni Perse, ni Turques. Des musulmans sunnites, ils ont laisser leurs empreintes notamment dans les guerres des croisades. Dans un futur proche, le Moyen-Orient connaîtra d'autres conflits à cause de la question Kurde.
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