mardi 14 octobre 2025

GEOPOLITIQUE 

LE BENGLADESH / LA FIN D'UN REGNE 

Le Bangladesh correspond au territoire de l'ex Pakistan oriental ayant résulté de la partition de l'Inde, en 1947, entre hindous et musulmans. Le Pakistan était alors constitué de deux territoires séparés par l'Inde. Le Pakistan occidental a mené une politique hégémonique qui ne tarda pas à susciter au Pakistan oriental une aspiration à une plus large autonomie. 



Aux élections de décembre 1970, la Ligue Awami, porte-parole de la contestation bengali, remporte la majorité des sièges. Islamabad, refusant le verdict des urnes, réagit par une intervention meurtrière au Pakistan oriental. Appuyés par l'Inde dans leur guerre d'indépendance, les Bengalis proclament l'indépendance du Bengladesh le 16 décembre 1971. Mujibur Rahman ( 1920-1975), dirigeant de la Ligue Awami, devient chef du gouvernement en janvier 1972 et président en 1975. Il assume tous les pouvoirs, exerçant une quasi dictature. Il est renversé en aout 1975 par un coup d'Etat, et "exécuté". De 1975 à 1990, le pays est gouverné par des militaires : Zia ur-Rahman ( 1935-1981) de 1975 président en 1977 à son assassinat en 1981, puis  Muhammad Ershad ( 1929), de 1982 président en 1983 à 1990. Ce dernier renforce la politique d'islamisation engagée par son prédécesseur. L'Islam devient ainsi religion d'Etat en 1988. La dégradation de la situation économique provoque de graves conflits sociaux qui oblige M. Ershad à démissionner en décembre 1990. Les premières élections démocratiques depuis l'indépendance voient la victoire du Bengdesh Nationalist party BNP dirigé par Khalida Zia, veuve de Zia ur-Rahman. La bégum Zia devient Premier ministre. Son règne est marqué par une progression des mouvements islamistes dont la Jamiat-e Islam fondé par Abul ala-Mawdudi. Sur le plan extérieur, les relations du Bengladesh avec l'Inde se sont détériorées dés la mort de Rahman. L'explosion démographique au Bangladesh a provoqué, à la grande irritation de New Delhi, une émigration massive vers l'Inde, tant dans les provinces frontalières ( Assam, Mizoram, Tripura ), que vers des villes comme Bombay, l'Inde, de son coté, a mené une politique hégémonique, notamment sur la question du partage des eaux du Gange et du Brahmapoutre. La montée en puissance des nationalistes hindous du Bharatiya Janata Party ( BJP) en Inde a compliqué davantage encore les relations entre l'Inde et Dacca. Ces tensions avec l'Inde ont rapproché Dacca, d'une part, de la Chine, qui voit dans ce territoire une ouverture potentielle sur l'océan indien, de l'autre, du Pakistan, en raison de l'avancée des islamistes au Bengladesh. La détérioration de la situation économique et l'accroissement des inégalités sociales font tomber le gouvernement de la bégum Zia en 1996. Les élections amènent au pouvoir la Ligue Awami conduite par la fille de Rahman, Sheikh Hasina Wajed. Sur le plan interne, les réformes engagées par cette dernière semblent porter leurs fruits à compter de 1997.Toutefois, deux problèmes majeurs ont continué de contrarier le développement du pays: une démographie élevée et des inondations catastrophiques, fléau permanant, qui font des ravages considérables chaque année; avec des destruction des récoltes, morts par centaines, sans-abri par milliers, voire par millions. Par un traité de paix, Sheikh Hasina a mis un terme en 1997 à la guerre civile qui sévissait dans les collines de Chittagong. Elle opposait, depuis vingt-cinq ans, des tribus d'origine tibéto-birmane aux Bengalis qui s'étaient approprié leurs terres. A compter de 1996, le Bengladesh a tenté de rétablir un équilibre dans ses rapports avec l'Inde, le Pakistan et la Chine. Ses rapports avec l'Inde ont connu une nette amélioration, grâce à une politique réciproque de bon voisinage. La visite officielle au Bengladesh du premier ministre indien, Atal Bihari Vajpayee, en juin 1999, lors de laquelle un traité économique a été signé, a consolidé le rapprochement entre Dacca et New Delhi. A l'aube du XXI siècle, le Bengladesh, devenu relativement démocratique, restait exposé aux problèmes des eaux et à ceux engendrés par sa dynamique démographique, d'une part, et par le confrontation entre groupes Laïques et éléments fondamentalistes pro pakistanais, d'autre part. A l'approche des élections générales au 7 janvier 2024, la première ministre Hasina, qui vise un quatrième mandat consécutif et gouverne le pays d'une main de fer, a donné un tour de vis supplémentaire, ordonnant l'arrestation de plus de 10 000 opposants et militants de partis concurrents. La principale force d'opposition, le Parti nationaliste ( BNP), est la première victime de cette compagne de répression. Ses dirigeants ont été arrêtés, éloignant la perspective d'élections libres. Le climat est à la violence. Des milliers d'ouvriers du textile sont descendu dans la rue pour exiger une hausse du salaire, sans obtenir gain de cause. Les heurts ont causé la mort de plusieurs personnes. Ce sont les pires troubles qu'ait connus ce pays pauvre d'Asie du Sud en une décennie. Le Bengladesh est un pays musulman de 170 millions d'âmes. Les étudiants contestent, sur fond de chômage aigu des diplômés, les faveurs dont bénéficient les proches du pouvoir pour devenir fonctionnaires. Le collectif étudiant " Students Against Discrimination"a pris la tête de cette insurrection qui a fait plus de 350 tués depuis de début juillet. Dans un pays qui compte de nombreux diplômés au chômage, les étudiants exigeaient l'abolition d'un système de discrimination positive qui réserve un quota d'emplois publics aux familles des vétérans de l'indépendance. Partiellement aboli en 1918, ce système a été restauré en juin par la justice, mettant le feu aux poudres, avant un nouveau retournement fin juillet de la Cour suprême. La crise sociale s'est muée en crise politique à partir du 16 juillet, quand la répression a fait ses premiers morts, les manifestants réclamant alors la démission de Hasina. 



Dans une prise de position hautement symbolique contre cette dernière, l'ancien chef de l'armée, le général Ikbal Karim Bhuiyan et plusieurs autres ex officiers supérieurs ont appelé au début août aux retrait des troupes de la rue, en soulignant que les gens n'avaient plus peur de sacrifier leur vie. Sur le plan géopolitique, ont constate l'ingérence de l'Inde dans ce coup d'Etat, afin d'éloigner la Chine du Bengladesh notamment sur la question de l'océan indien. 


MOHAMMED CHERIF BOUHOUYA 

 



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