GEOSTRATEGIE/ LA NOUVELLE GUERRE FROIDE SINO-AMERICAINE
Depuis la fin de la guerre froide, le Pentagone se cherche un adversaire. Le développement économique fulgurant de la Chine depuis deux décennies et ses nouvelles ambitions géopolitiques, en mer de Chine, à travers les nouvelles routes de la soie, ou encore en Afrique, sans oublier le Pacifique, précipiteraient ainsi les deux géants vers une confrontation militaire inévitable pour le leadership mondial. Depuis Washington, se mobilise , à même de légitimer ses budgets militaires colossaux tout en écartant ses fidèles alliées comme la France, les enjeux des intérêts géoéconomiques et géostratégiques l'imposent?
Certes, la Chine est désormais une grande puissance. Elle en a pleinement conscience et cherche à présent, à faire reconnaitre son statut à l'échelle international. Un dilemme qui ne manque pas de créer des tensions entre les deux rives du Pacifique. Des nouveaux théâtres d'affrontements globaux dans lesquels la Chine et les Etats-Unis déplacent désormais leurs pions dans les domaines de la mondialisation, cyberespace, espace, extra-atmosphérique, physique quantique et autres. Toute confrontation armée est devenue complexe à mettre en œuvre, et le recours éventuel à l'arme atomique rend le basculement vers un conflit majeur encore incertain pour les deux camps. Au-delà, des puissances tierces, mais aussi dotées d'un poids militaire difficilement contournable, telles l'Europe et la Russie, ne peuvent être purement effacées de l'équilibre existant.
LA DEBUT DE LA NOUVELLE GUERRE FROIDE
D'un point de vue idéologique, le renouveau est réel depuis l'arrivée de Xi Jinping au pouvoir, qui façonne fortement les orientations de politiques intérieure et extérieure du pays. En particulier, le ressentiment anti-occidental, héritage du maoïsme, est solidement ancré au sein de l'élite du parti et entretenu par la doctrine communiste considéré comme un combat vital. Si les idées démocratiques gagnent du terrain dans le monde, le parti communiste risque d'être déstabilisé pour toujours. D'ailleurs, tous les services secrets Occidentaux sont mobiliser pour le combattre, non seulement sur le territoire Chinois, mais au-delà des frontières. Le nouveau maître de l'empire du milieux, considère que le système de gouvernance chinois doit devenir une référence pour le monde. Nous en sommes loin, mais l'ambition est réelle et ne doit pas être sous-estimée notamment en Afrique, en Amérique Latine et en Asie. Pour la nouvelle administration américaine, il existe une relative continuité de la politique des Etats-Unis envers la Chine. Joe Biden, perçoit la Chine comme la première des menaces. Elle n'a pas levé les sanctions commerciales et technologiques mises en place au cours des années précédentes, et affiche sans ambiguïté ses divergences de vues vis-à-vis de la Chine, que ce soit aux niveaux bilatéral comme multilatéral. Sur la méthode, au moins deux différences principales sont à noter : sa rivalité avec la Chine s'inscrit dans une politique plus affirmée de défense des droits de l'homme et de promotion de la démocratie. C'est dans ce cadre que l'administration Biden a annoncé l'organisation d'un sommet pour la démocratie. Surtout , c'est avec l'aide des alliés que Washington souhaite faire face aux ambitions chinoises. Alliés avec lesquelles elle tente actuellement de retisser les liens, à travers le dialogue quadrilatéral pour la sécurité, incluant les Etats-Unis, l'Inde, l'Australie et le Japon, et plus largement l'échiquier géopolitique et géostratégique indo-pacifique, mais elle a perdu la France, un allié de taille qui a était trahit. Depuis mi-2020, la Chine a durci sa politique étrangère vis-à-vis des américains, mais également de tous pays ou acteur qui remettrait en cause ses positions sur l'origine du coronavirus. Pékin, a décidé de répondre systématiquement à toute décision ou propos critique. Par conséquent, les relations de nombreux pays avec la Chine sont devenues plus volatiles et une escalade des tensions n'est jamais loin. Y compris avec l'Union européenne: la décision de Bruxelles du 22 mars de sanctionner des responsables chinois accusés d'atteintes aux droits de l'homme envers la population Ouïghoure, de son coté, l'Australie est touchée par des sanctions économiques chinoises lourdes dans de nombreux secteurs a savoir, l'agriculture et matières première suite à une accumulation de décision et de déclarations de Canberra jugées hostiles par Pékin. Dans l'idéal, Pékin aimerait que la nouvelle administration américaine et ses alliés ne prennent plus position sur ces enjeux. Mais comme cette hypothèse est improbable, qui vise à terme à bâtir un front contre les Etats-Unis et leurs alliés dans les organisations internationales, à les présenter comme une minorité politique, démographique. Ainsi la Chine déclarait également : les Etats-Unis, le Royaume-Uni et le Canada ensemble ne représentent que 5,7% de la communauté internationale, une approche simplificatrice et osée, celui de marginaliser l'Occident.
INGERENCE AMERICAINES ET MENACES CHINOISES
Les points de tension sont actuellement nombreuses: mer de Chine du Sud, Taiwan, Hong Kong, Xinjiang, le Pacifique et surtout la répression. La Chine considère illégitime toute ingérence américaine sur ces enjeux, comme elle perçoit ostentatoirement illégitime la présence militaire américaine en Asie au sens large et surtout au Pacifique. La situation à Hong Kong reste très tendue, et les tensions se sont également renforcées dans le détroit de Taiwan, avec notamment le passage d'un grand nombre d'avions de guerre chinois dans la zone d'identification et de défense aérienne de l'ile ces derniers mois. Pékin perçoit avec persistance que ces deux enjeux comme des priorités nationales, qui font partie intégrante du grand renouveau de la nation chinoise, et sur lesquelles il ne faut en aucun cas transiger. Sur le plan tech-guerre contre Pékin, le président chinois a accéléré le développement des nouvelles technologies dans le pays et au-delà: centres de données, réseaux de câbles sous-marins, réseaux 5 G, de caméras de surveillance dernière génération, reconnaissance faciale, intelligence artificielle, blockchain et cryptomonnaie, objets connectés. Si La Chine reste dépendante de certains composants étrangers, elle ambitionne à terme de les fabriquer elle-même intégralement. Cela prendra du temps, mais elle engage dés à présent des ressources conséquentes afin de soutenir cet objectif. Le lancement du XIV plan quinquennal en 2021, qui couvre la période 2021-2025, a confirmé la stratégie chinoise de consolidation de sa puissance technologique, avec une politique d'investissement ambitieuse. Il s'agit d'un processus de long terme. La Chine n'arrivera probablement pas à se passer de certaines technologies étrangères dans les prochaines années, mais elle fera tout son possible pour limiter sa dépendance.
LA MAINMISE SUR L'ECONOMIE MONDIALE/ UN
TERRAIN D'AFFRONTEMENT MONDIAL
La Chine a lancé récemment son yuan numérique, qui a vocation à s'internationaliser et pourrait permettre de contourner les sanctions américaines. Cette nouvelle devise pourrait remettre en cause la mainmise du dollar sur l'économie mondiale et permettre ainsi un nouveau terrain d'affrontement entre les deux puissances. Certes, l'investissement chinois dans le domaine de la blockchain et de la cryptomonnaie inquiète Washington. Ainsi, depuis l'installation de la nouvelle administration Biden, et alors que la Chine accélère et étend l'expérimentation de sa monnaie numérique, des représentants du Pentagone, du trésor et du département d'Etat américain mutualisent leurs efforts afin de mieux comprendre les conséquences potentielles de l'initiative chinoise, notamment en matière d'affaiblissement du dollar comme monnaie de réserve au niveau mondial sur le long terme, et identifier des plates formes pour y faire face.
Forte de ses capacités économiques, technologiques et militaires accrues, la Chine de Xi Jinping cherche à développer une diplomatie à la mesure de la superpuissance qu'elle aspire à devenir. Soucieuse de maitriser l'image qu'elle projette, la Chine s'emploie à marteler l'efficacité de son modèle politique. Toutefois, le triomphalisme affiché par l'hégémonie chinoise est loin de convaincre l'ensemble de la communauté internationale.
MOHAMMED CHERIF BOUHOUYA
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