GEOPOLITIQUE/ LE DEFI DES FRONTIERES EN AFRIQUE ET L'IMPLICATION DES SERVICES MAROCAINS ET ISRAELIENS
colonisation, décolonisation, les frontières incarne un objet tout autant qu'un concept. Dans un monde globalisé, elle peut être matérialisée dans l'espace physique et constitue un lieu identifiable et transcriptible, elle définit une vision particulière des sociétés humaines dans leurs rapport à l'espace géographique, aux populations ainsi qu'aux identités culturelles ou ethniques qui les composent. Au fil des siècles, les frontières sont devenus sources de conflits, de guerre et flucture en fonction des époques et des systèmes politiques.
Sous la double dynamique d'une globalisation économique contribuant à la libre circulation des biens et du large développement d'un univers numérique diffusant et nivelant à l'échelle mondiale les informations, nous nous sommes laissés convaincre que les frontières constituaient le vertige de temps anciens. Paradoxalement, les crises des migrants, la pandémie du Covid 19 et le renouveau de géopolitique agressives contestant des frontières internationales reconnues en Ukraine, en Géorgie, en Algérie, en Méditerranée orientale ou encore en mer de Chine, nous rappellent que, loin de s'effacer, les frontières constituent encore source d'hégémonie et d'instabilité des populations, surtout quand les services secrets s'impliquent de façon direct, comme c'est le cas du Maroc, l'Arabie-Saoudite, les Emirats-Arabes Unies, et Israël. Au total, 40 pays sont espionnées, y compris les politiciens, les opposants, les journalistes, et les ONG des droits de l'homme. Un scandale orchestré par le Maroc, les monarchies arabes et Israël, via le projet "Pegassus", installé en Israël.
L'AFRIQUE ET SES FRONTIERES
Souvent décrites comme les cicatrices de la violence des puissances impériales, les 54 Etats souverains du continent Africain sont délimités par prés de 165 frontières terrestres communes à deux Etats, sur une longueur de 84600 KM. Certes, elles restent mal démarquées, mais le support d'une intense vie économique régionale, surtout lorsqu'elles recoupent d'anciens ensembles historique ou ethnique. Contrairement à un stéréotype encore vivace, le continent africain, avant la colonisation européenne, ignorait les découpages politiques. La période coloniale fut en réalité de courte durée ( 1885-1960) même si les empreintes restent très profondes. Certes, les limites des ensembles politiques n'étaient pas des configuration Linéaire ( invention technique européenne du XVIII siècle, mais chaque centre de pouvoir connaissait parfaitement l'extension de son air d'allégeance, à toutes échelles. d'ailleurs, plusieurs entités ont été en mesure d'opposer de vives résistances à l'entreprise coloniale. Historiquement, on le constate sur des archives pour le royaume Ashanti, l'actuel Ghana, et l'empire de Samory Touré, étendu en Guinée et au Mali, les Tribus de Tanzanie, les royaumes Zoulou et xhosa face aux Anglais et aux Boers, et l'emire Amhara d'Abyssinie longtemps capable de repousser les tentatives impériales Italiennes. Bien entendu, faute de source écrites sauf en arabe et, on connait mal le détail des configurations territoriales des Etats et des empires précoloniaux; sans négliger la confiscation des archives par les puissances coloniales et aussi la falsification des données historiques. Mais les réalités conservées dans les mémoires orales ont été confirmées par les récits coloniaux. Au-delà des stèles égyptienne en Nubie et des lignes de forteresses d'Afrique du Nord ( Algérie, Tunisie, Lybie, Maroc), les contours des royaumes africains étaient des zones, moins peuplées que les centres, qui exerçait un contrôle décroissant sur des auréoles concentriques. Les puissances y ont donc surimposé une conception Linéaire de frontière, mais n'ont pas inventé le fait que tout pouvoir s'exerce sur une assise territoriale et démographique. En somme, à partir de 1853, les métropoles coloniaux ont cherché à s'appuyer sur les entités préexistantes pour le tracé très découpé de la frontière Franco-Anglaise entre le Niger et le Mali. Il n'en demeure pas moins que des tracés ont été effectués en toute méconnaissance des espaces accaparés d'abord sur des documents, sur un continent qui comptait moins de 130 millions d'habitants au moment de la conférence de Berlin en 1885 qui décida des modalités de partage entre les puissances européennes. Le vecteur central du découpage fut de se répartir des possessions à venir et des sphères d'influence entre puissances extérieures rivales mais fortement complices. Il s'agissait donc de frontières a priori, à l'inverse des tracés européennes, fixées à posteriori, au gré des luttes et des rapports de force, des affirmations nationales et de l'émancipation des formations impériales, figées par les traités. Au sein du continent, la moitié des longueurs de la scène frontalière africaine résulte de négociation entre les sept Etats-traceurs européens. Pour le Ghana et le Togo, un quart sont issues d'anciens découpage administratifs internes aux ensembles impériaux. Entre le Mali et le Sénégal, elles n'ont pas fait l'objet de traités internationaux et ont varié au gré des décisions des administrateurs de "cercles" ( le cercle était la plus petite unité de l'administration dans les colonies africaines de la France de 1895-1946). Entre-autre, prés de 7% résultent des tracés de la période Ottomane pour ( l'Algérie, la Tunisie, la Libye et l'Egypte). 12% ont impliqué des Etats africains et des européens. Enfin, moins de 7% ont été décidées entre pays africains, comme le Soudan et le Soudan du Sud chapeautés par les puissances étrangères, cohabitant toujours sous la menace conflictuelle, le poids des religions et les guerres des richesses. A travers cette analyse de font sur un continent qui nage encore a contre-courant par-rapport à ses frontières, les grands pays traceurs ont y trouve la France avec 32% et le Royaume-Unis dont le chiffre exact est de 26,8%, soit un peu moins de 60% à eux deux. Viennent ensuite l'Allemagne 8,7%, la Belgique 7,6% et le Portugal 6,9%, soit prés de 82% pour les cinq pays cités. La Turquie Ottomane 4%, l'Italie 1,7% et l'Espagne 1,5% complètent le tableau des traceurs historiques extérieurs au continent. Pour mémoire, la France et le Royaume-Unis rédigent en moyenne 70% des résolutions présentées au Conseil de sécurité des Nations-Unies, rejetant leur anciens statut colonial puis postcolonial, tout en conférant des responsabilités mondiales durables.
FRONTIERES ASSUMEES ET ACTIVES/ MYTES ET REALITES
Concernant les frontières assumées, et en dépit de cette origine externe et imposée des frontières Linéaires contemporaines et pour "prévenir" des contentieux graves, les Etats africains indépendants entre 1957 et 1962, s'accordèrent sur le principe de l'intangibilité des frontières, proclamé lors de la conférence de l'OUA ouverte par le président Egyptien Nasser:( Considérant que les problèmes frontaliers sont un facteur grave et permanant de désaccord, consciente de l'existence d'agissement d'origines extra-africaine visant à diviser les Etats-Africains, considérant en outre que les frontières des Etats du continent, au jour de leur indépendance, constituent une réalité tangible. Il déclare solennellement que tous les pays membres s'engagent à respecter les frontières existant au moment où ils ont accédé à l'indépendance.) Ce principe d'intangibilité a été respecté, à de rares exceptions prés. Ont déduit alors, que l'engagement du Caire de 1964 a été globalement tenu et continue de l'être. Il a d'ailleurs été confirmé par la CIJ de la Haye qui tranche, elle aussi, les différents selon le même principe, en recherchant l'instantané colonial, c'est-à- dire le moment décisif de l'acte juridique du tracé de la période coloniale, qui devra ensuite faire foi, actuellement et dans l'avenir ( elle a statué sur neuf contentieux frontaliers africains.) Et pourtant, des conflits violents, entre le Mali et le Burkina-Faso ont éclatés en 1985. Depuis la création de la division ( paix et sécurité) de l'Union africaine lancé en 2007, le programme qui vise à encourager les pays africains à achever par eux-mêmes la démarcation de leurs frontières afin de pouvoir tirer des ressources qu'offrent les interfaces frontaliers, a fait propulser certains Etats vers le devant de la scène continentale. Néanmoins, il convient de noter que, si des contentieux demeurent encore comme le Sahara-Occidental arraché par la force par le Maroc les monarchies arabes et Israël, ou celui de la Somalie sur l'aire de peuplement somali dans la corne de l'Afrique et sécession mal négociée du Soudan du Sud, d'autres comme l'Ethiopie et l'Erythrée ont été réglés après 25 ans de tension.
Les analyses de terrain démontrent pour certains pays africains, la montée des groupes subversives et l'instrumentalisations des minorités comme le MAK en Kabylie, les exactions de Boko Haram et la crise du Cameroun anglophone et le gouvernement. Tensions dans la région des grands Lacs autour des Kivus, dont les richesses sont pillées par les voisins Rwandais et Ougandais. A travers cette approche, les manipulation, les ingérences extérieurs, la soif des richesses, et les rapports de force fragile sur le plan géopolitique, le continent tout entier reste un défi encore éteint.
MOHAMMED CHERIF BOUHOUYA
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire