En Asie centrale,
la coopération sino-russe semble mieux s’organiser. Pour réconcilier leurs intérêts
nationaux dans cette région, Moscou et Pékin ont décidé de combiner leurs
stratégies avec l’initiative russe de l’Union économique eurasiatique (UEE.)
Cette dernière qui regroupe la Russie, l’Arménie, la Biélorussie, le Kazakhstan
et le Kirghizstan, est la plus récente des tentatives russes de promouvoir l’intégration
économique entre la Russie et les anciennes républiques soviétiques.
L’un des
résultats du rapprochement sino-russe est l’adhésion active de Moscou au projet
(Belt and Road Initiative (BRI) qui vise à créer un réseau d’infrastructures
terrestres et maritimes pour relier la Chine à l’Europe occidentale. Cet
ambitieux programme économique devrait à terme assurer la circulation de biens,
de capitaux et de personnes à travers l’Eurasie sous l’impulsion de Pékin. Depuis
quelques années déjà, la Chine est devenue le principal partenaire commercial
de tous les pays centre-asiatiques. Ce développement colossal, s’est fait au
détriment de la Russie, qui ne possède pas de moyens financiers pour contrer l’augmentation
de la présence Chinoise en Asie-centrale. Ce hard power chinois qui se dessine
en silence, inquiète le Kremlin qui redoutait le déclin de son influence
politique dans la région, considérée comme l’un des maillons du périmètre de sa
sécurité nationale. En effet, la faiblisse économique de la Russie face au géant
émergeant, le déséquilibre structurel du commerce bilatéral, la disparité
démographique le long d’une frontière de plus de 3000 km, sont autant de préoccupations
qui minent les perspectives de ce nouveau rapprochement. Toutefois, l’isolement
croissant de la Russie sur la scène internationale a poussé Poutine à revoir sa
position et à envisager malgré tous les dangers une coopération très étroite
avec la Chine.
L’ARCTIQUE
ET LES NOUVEAUX STRATÉGIES SINO-RUSSE
La Chine
participe désormais depuis 2017 aux exploitations de gisements d’hydrocarbures
arctiques non seulement comme une puissance économique, mais aussi comme
fournisseur d’équipements technologiques. Le projet (Yamal LNG) en est une
illustration de ce mégaprojet qui vise à l’exploitation du gisement du gaz naturel de
la péninsule du Yamal, située au-delà du cercle Arctique, ensuite l’exporter
par les méthaniers, en Asie, en suivant le passage du Nord-Est qui longe la
cote nord de la Russie jusqu’au détroit de Béring. Ce projet fut au départ
envisager comme une initiative Franco-russe, dont Total et Novatek étaient les
actionnaires majoritaires, après l’imposition de sanctions par les pays
occidentaux qui ont ciblés aussi l’énergie, le Kremlin a du se tourner vers Pékin.
Devenu le second actionnaire, la Chine contrôle avec 50,2% d’actions, reléguant
ainsi le français Total avec 20% d’actions, ce projet pharaonique devrait
produire 16 millions de tonnes par an à partir de 2019. Afin de rendre le site opérationnelle,
il fallait construire un complexe industriel sur le permafrost avec un port,
capable d’accueillir de grands méthaniers, brise-glace, un aéroport international,
des routes, des voies ferrées et des réservoirs
géants pour stocker le CNL. Si les américains ayant bloqué l’accès de la Russie
aux technologies, aux équipements, et aux crédits nécessaires pour finaliser ce
projet, les compagnies Chinoises ont défiés les Etats-Unis dans cette région stratégique.
La China Offshore Engineering Company a fabriqué 37 modules pour l’usine de gaz
du site Yamal, tandis que la CNPC Offshore a conçu et produit les différents
équipements pour les docks du port et les méthaniers, sans oublié les banques
Export-Import qui ont accordés un crédit de 12 milliards de dollars. L’intérêt
Chinois dans l’Arctique ne connait pas de limite, elle ambitionne avec force de
participer à l’organisation du trafic commercial sur le passage du Nord-Est,
qui est inclut dans le réseau maritime de la BRI. Cette voie polaire qui attise
des convoitises multiples, la Chine vise également la construction de chemin de
fer de Belkomur qui relierait Arkhangelsk à la Sibérie occidentale, et aussi la
mise en valeur du gisement de gaz naturel sur la péninsule de Gydan, dans la
mer de Kara, qui devrait à terme produire autant que Yamal LNG. Pour le
président Poutine, la réalisation du projet Yamal LNG est glorifiée avant tout
comme un atout national, et une victoire stratégique qui permettrait à Moscou
de renforcer sa position sur le marché mondial du gaz et d’asseoir sa place d’acteur
incontournable dans l’Arctique.
Le rapprochement
géoéconomique de Moscou et Pékin semble trancher avec la désunion du G7 minée
par les actions unilatérales des Etats-Unis en matière de coopération
économique et diplomatiques avec ses alliés occidentaux. Ce partenariat
sino-russe, parait désormais comme un défi au américains et aussi à l’Union –Européenne.
En parallèle, le Kremlin à adopter une attitude très prudente envers la Chine
et reste très sceptique sur le plan diplomatico-géopolitique de servir de modèle
de coexistence harmonieuse aux pays majeurs et aux nations voisins.
MOHAMMED CHÉRIF BOUHOUYA
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