GEOPOLITIQUE/ GEOSTRATEGIE: LA SOUVERAINETE EUROPEENNE DE DEFENSE ?
Le projet européiste de la France ne compromet-il pas son rôle propre et les intérêts d'une Europe globale, voire ce qui reste de l'hégémonie Occidentale? Celle-ci ne repose pas sur les seuls responsabilités des Etats-Unis, mais sur l'efficacité de plusieurs directoires: Le P3, Washington, Londres et Paris, au sein du Conseil de sécurité; Le Quad euro-atlantique dans l'OTAN " Le P3+ l'Allemagne"; le G7 "le Quad + le Japon, le Canada et l'Italie". C'est de cette manière que les principales nations européennes, sous l'égide des Etats-Unis, ont pu se maintenir dans la politique mondiale. La France et le Royaume-Unis, participant à chacun de ces directoires.
Il est à craindre que la dissolution de ces solidarités à la fois géopolitiques et géostratégiques, loin de bénéficier à l'Europe, accélère son déclassement. Devenue la péninsule d'une grande Eurasie sino-russe, elle se diviserait. En fait de souveraineté partagée et d'autonomie stratégique, les Nations européennes inaugureraient une nouvelle époque. La France par exemple, devrait privilégier ses relations avec les Etats-Unis et le Royaume-Unis. Ces deux puissances nucléaire ( la France et le Royaume-Unis) assurent déjà la moitié de l'effort militaire européen. L'avenir de l'Europe géopolitique repose d'abord sur leurs puissances, Par-ailleurs, s'il importe de faire front à l'Est, il serait erroné de réduire les enjeux géopolitique de l'Europe à leur dimension terrestre et continentale. En somme, la liberté et la prospérité de l'Europe se déterminent au-delà des anciens visions stratégiques, sur les grands routes maritimes qui la relient au golfe Arabo-Persique. Sachant que les prétentions de la Chine à annexer tout ou partie des méditerranées asiatiques ( les mers de Chine du Sud et de l'Est) par où transitent les échanges entre l'Europe et l'Asie. De surcroit, le France est consciente que le programme des nouvelles routes de la soie vise la domination du monde. Déjà, la flotte chinoise opère en Méditerranée, manœuvre avec la flotte russe sur les approches de l'Europe et affirme ses ambitions arctiques ( voire l'analyse sur le site.) Puissance possessionnée dans l'Indo-Pacifique, dont 90% de son domaine maritime, la France reste exposé a plusieurs défis. En cas de menace sur ses territoires, la géographie de son outre-mer et les impératifs stratégiques exigent qu'elle se rapproche des Etats-Unis, l'Australie, le Japon et l'Inde. Le projet d'une Europe souveraine pèche par volontarisme et artificialisme; il n'est pas sûr qu'il soit mobilisateur partout au sein de l'Union-européenne. Devenu un objectif en soi, ce projet n'est pas la réponse adéquate aux défis et menaces d'un monde dont les équilibres se déplacent vers la Chine. Si l'Union-européenne a sa raison d'être sur le plan géoéconomique, elle n'est pas en mesure de se poser en acteur géopolitique global et surtout d'influencer la configuration diplomatique et stratégique de la région Indo-Pacifique.
L'AUTONOMIE STRATEGIQUE DE L'EUROPE ET DEFENSE DE L'OCCIDENT
Le président Français Emmanuel Macron accorde au thème de la souveraineté et de l'autonomie stratégique, envisagées à l'échelle de l'Union, avec pour projet une défense intégrée. Depuis son discours de 2017, le président est revenu à maintes reprises sur la question, se penchant à parler d'une armée européenne. La conférence sur l'avenir de l'Europe est censée donner un nouveau souffle, et la prochaine présidence Française de l'Union-européenne devant amplifier la dynamique. La France, puissance dotée, inégalante expression qui renvoie à son statut international, siège au Conseil de sécurité de l'ONU et force de frappe nucléaire, jouirait d'avantage comparatif. En prenant appui sur l'Allemagne, elle pourrait donner un contenu à un vieux slogan sur l'Europe. Parallèlement, le nouveau leadership de Joe Biden et la centralité de l'OTAN sont présentés comme une concurrence déloyale à l'égard de la France. Or, une défense européenne intégré, émanation d'une souveraineté européenne, présupposerait une autorité politique unifiée, une chaine de commandement opérationnel et des unités dans lesquelles les forces des différents nations seraient imbriquées. Un tel projet impliquerait la formation d'un acteur géopolitique global européen. Cela signifierait la Constitution d'une fédération des Etats-Unis d'Europe? A mon avis, cette vision sera la configuration de tous les nations d'un monde futur qui se joue à long terme. Malgré l'institution d'une Coopération structurée permanente ( CSP), en réponse au Brexit et aux craintes par l'élection de Trump, est bel et bien une avancée triomphante; la vision Française d'un noyau dur d'Etats volontaires, prêts à intervenir de vive force sous drapeau européen, n'a pu être mis en place. Sur les vingt-sept Etats de l'Union, vingt-cinq sont engagés au sein de cette CSP. Le choix d'une CSP large n'est donc pas tourné vers la préparation d'interventions extérieurs, mais vers la mutualisation de programmes d'armements et de capacités militaires. En clair, il s'agit d'une Europe des capacités, appuyée par un Fonds européens de la défense (FED). Le dispositif d'ensemble s'inscrit dans une logique intergouvernementale. Lancée par la France afin de compenser les insuffisances de la CSP, l'initiative européenne d'intervention ( IEI) est tournée vers le champ opérationnel. Située hors de l'Union, cette coopération est strictement interétatique. Le Royaume-Unis (post-Brexit) et le Danemark ( hors PSDC) y participent. Quant à la coalition de forces spéciales "Takuba", déployée au Sahel, elle ne relève pas de l'Union-européenne. Parmi les opérations de l'Union, on mentionnera ( EUNAVFOR Irini), principalement chargée de surveiller la mise en œuvre de l'embargo sur les armes à destination de la Libye. Son objectif est de désigner les violations, non pas de les interdire. Dans le détroit d'Ormuz, la mission européenne de surveillance maritime ( EMASOH) a une portée réelle, mais trop limitée. Concernant la coordination des actions dans la Méditerranée, les forces européennes ne parviennent à intervenir qu'au sein de l'OTAN.
A rebours du programme d'Emmanuel Macron, l'équilibre des forces sur l'échiquier mondial font plutôt redouter qu'une action prétendant forcer le réel ait un effet inverse de l'objectif affiché. En d'autres termes, un projet de souveraineté européenne, sans points d'appui ni facteurs porteurs, pourrait amplifier les visions d'Emmanuel Macron.
MOHAMMED CHERIF BOUHOUYA
NB/ Lancée en 1999, après la guerre du Kosovo, l'Europe de la défense visait à pouvoir mener des interventions de ce type, dans le cadre de l'Union. Deux décennies plus tard, les nations européennes s'avèrent très rétives aux interventions extérieurs.
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