GEOSTRATEGIE/ LE HARD POWER CHINOIS AU
XINJIANG
Du fait de sa position géographique, le Xinjiang constitue une interface logistique clé dans la stratégie de projection des intérêts chinois en Asie centrale et plus largement en Eurasie. La construction de pipelines dans les années 2000 permettant via le Xinjiang d'exporter le gaz et le pétrole centrasiatiques vers la Chine en fait un véritable boom énergétique. Le Xinjiang est aussi au cœur des lignes ferroviaires et réseaux routiers de la Belt and Road Initiative ( BRI). Identifiée par Pékin comme une des provinces-clés de la BRI, la région est le point d'émergence de trois des six corridors terrestres de l'initiative ( le premier se dirigeant vers la Russie et l'Europe, le second vers l'Iran et la Turquie, sans oublier le Pakistan). Le but est de stimuler son commerce extérieur en faisant baisser les coûts et les temps de transport.
Grande comme trois fois la France, la Région autonome des Ouighours du Xinjiang assure environ un sixième de la production chinoise de pétrole, environ le quart de celle de gaz naturel et dispose de prés du quart des réserves d'hydrocarbures du pays. Elle abrite aussi d'importante réserves de charbon, de divers minerais mais également du deuxième potentiel national dans l'éolien et le solaire dans un pays où la transition vers les énergies renouvelables est une des priorités nationales. Le soutien à l'important secteur des entreprises d'Etats dans la région, les transferts de l'Etat central vers la région autonome ou le soutien à l'accès aux subventions et financements bancaires a longtemps été considéré par le parti communiste comme une des clés à la croissance régionale. Alors que Xi jinping posait les cadres de la BRI, les Ouighours faisait face depuis quelques années à une montée des tensions et de la violence. Les attentats à l'explosif, au véhicule bélier et les attaques à l'arme blanche se multipliaient au Xinjiang et au-delà, Xi jinping finit par déclarer en 2014 une lutte sans merci lors d'un fameux discours devant le PCC. Puisque il s'agit d'une colonisation forcée et l'effacement total d'une minorité musulmane, il accéléra la réorganisation de l'appareil sécuritaire tout en privilégiant désormais le recours au Département du Front Uni pour contrôler les activités religieuses et les minorités nationales. Certes, le dispositif de contrôle sur la société Ouïghoure avait déjà été renforcé depuis les années 1990, mai suite à la flambée de violence de 2014, le Xinjiang avait alors connu une nouvelle campagne ( extermination des terroristes violents). Au tournant de l'année 2016, Xi Jinping initie un système ultra -sécuritaire visant à éradiquer non seulement tout acte de violence mais d'éradiquer totalement toute forme de défiance ou de pensée alternative à celle du Parti communiste. L'arrivée à la tète du Parti du Xinjiang en 2016 de Chen Quanguo est un élément déterminant. Ce dernier limite la contestation en misant sur un contrôle de la société et une répression des expressions critiques qui débordaient sur la scène publique, sans oublier le contrôle des mosquées, l'interdiction du Coran, les attroupements, les camps de concentrations, les tortures, les prisons, les sévices sexuelles sur les femmes et l'endoctrinement des enfants.
REPRESSION ET SECURITE ULTIME
Les budgets alloués à la sécurité vont exploser. Les recrutements au sein de la police atteignent des niveaux jusque-là inconnus, alors que des antennes des bureaux de la sécurité publique doivent ouvrir dans chaque village ou hameau. Pendant que le Xinjiang devient plus que jamais un vaste terrain d'expérimentation pour l'Etat et les fleurons de la surveillance high-tech et du big data sécuritaire, la majorité des Ouighours se voient privés de leur passeport. Le vaste système de vidéosurveillance avec reconnaissance faciale déployé au cours de dernière décennie est croisé avec les vastes fichiers "ADN", d'empreintes digitales, vocales faciales répertoriant chaque individu. Cet univers de l'ulracontrole Staliniste, s'inscrit dans la mise en place de l'Etat sécuritaire promu par Xi jinping. Pour autant, au Xinjiang , les dispositifs vont plus loin, puisqu'il s'agit d'aller au-delà de la surveillance de ceux qui transgressaient les lois de l'Etat. La collecte de données via la (plateforme d'opération jointe intégré) conjuguée à l'étude de comportements inhabituels doit permettre d'anticiper et de classer les individus en fonction de leur degré de loyauté et du risque sécuritaire qu'ils font peser. Ainsi les séjours à l'étranger, notamment dans la liste chinoise des pays à risque, le fait d'avoir de la famille à l'étranger, d'échange avec les étrangers ou des personnes ayant WhatsApp, de porter la barbe, de ne pas boire d'alcool, de ne pas fumer, de manger halal, de faire le Ramadan, de ne pas manger du porc ou bien donner à ses enfants des prénoms musulmans jugés subversifs ( tel celui du Prophète) font partie de la multitude de critères permettant un potentiel basculement vers l'extrémisme ou vers toute exposition à des idées pouvant nourrir la défiance face au Parti. En réalité, ses pratiques nous rappellent le Nazisme Hitlérien et aussi le Stalinisme Russe, avec la complicité de silence assourdissant des puissances, et surtout les monarchies arabes qui observent de loin leurs frères musulmans passés à la purification ethnique.
LE XINJIANG, LE MONDE MUSULMAN ET L'OCCIDENT
Malgré les dénégations du gouvernement chinois, des données satellites et l'étude des marchés publiques, ont mis en évidence, l'existence d'un vaste système de rééducation extrajudiciaire susceptible d'interner 12% de la population turcophone du Xinjiang, soit environ 2 million de personnes. Pour autant, les témoignages des familles ou d'anciens détenus, la fuite de documents officiels dont le fameux " Xinjiang câbles et papers" et les divers rapports et informations communiqués par les organisations diasporiques Ouïghoures ou de défense des droits de l'homme ont fini par sensibiliser une partie des gouvernements Occidentaux. A partir de 2018, la RPC a fini par présenter ces centres comme des structures d'éducation et de formation professionnelles légitimés par la disparition des actes de violence au Xinjiang, ce qui est totalement faut. Pékin a pu compter sur plusieurs déclarations de soutien à l'ONU, obtenant la signature d'une cinquantaine d'Etats, principalement du continent Africain, du monarchies arabes d'Asie du Sud, du Sud-Est et du monde arabe.
Le Xinjiang entre enjeux stratégiques et exterminations, la Chine n'a pas cédé et pose son modèle répressif et autoritaire en modèle alternatif au modèle Occidental. Elle bénéficié, à ce titre, du soutien croissant de pays qui rejettent la démocratie libérale et la lecture Occidentale des droits de l'homme. Après la colonisation directe du Tibet, fatalisme, résilience et escapisme a Hong Kong et actuellement Taiwan, les dérives de la Chine vont provoquées inévitablement leurs pertes, par une troisième guerre mondiale.
MOHAMMED CHERIF BOUHOUYA
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