mercredi 12 avril 2023

 GÉOPOLITIQUE/ L’UNION EUROPÉENNE EN 2050

À mi-chemin entre le soft power et le hard power, ancrée dans les atouts de la puissance européenne le poids commercial et financier, l’attractivité médicale et bancaire, les sanctions sont devenues le véritable arsenal des Européens pour peser dans les relations internationales.



D’ici 2050, l’Union est placée face à des défis internationaux multiples. Elle est placée, par sa géographie, au contact de puissances actuellement en résurgence, comme la Russie et la Turquie. Par construction, elle n’a ni l’unité ni la tradition militaire de ces voisins rivaux. L’autre grand défi géopolitique est constitué par le piège de Thucydide, théorisé par Graham Allison : dans la confrontation entre ( la puissance installée) des États-Unis et la puissance montante de la Chine, quel doit être le positionnement des Européens. L’Union peut-elle négliger son espace méditerranéen au moment où le centre de gravité géopolitique du continent semble se porter à l’est. Pour les décennies qui viennent, trois scénarios peuvent être inéluctables afin d’esquisser l’avenir de l’Union sur le continent et dans le monde d’un point de vue géopolitique et géostratégique. Les facteurs de ces évolutions sont bien plus divers que le strict rapport de force international. Ils comprennent les ruptures technologiques, les dynamiques démographiques, les bouleversements stratégiques et les chocs économiques.

SCENARIOS ENVISAGES


L’Union traverse déjà depuis deux décennies des difficultés conjoncturelles et structurelles évidente pour faire face à l’adversité internationale. La stratégie russe ne répond pas seulement à une volonté hégémonique personnelle des dirigeants russes. Elle résulte d’un mouvement profond qui vise à garantir des zones d’influences, en Europe centrale, dans le Caucase, en mer Noire, en Baltique et en Arctique. La Russie présente un risque géopolitique que l’Union ne peut traiter qu’indirectement par les sanctions en raison de la vulnérabilité de son autonomie stratégique. De surcroît, l’Union, défiée par la Turquie en Méditerranée et en Afrique du Nord, n’a pas les outils, la réactivité ni la volonté de se lancer dans une stratégie d’hégémonie. Dans une période de crise multiforme, annonciateur de conflits très durs, l’Union est déjà protégée par l’OTAN. Dans ce premier scénario, les Européens se concentreraient sur leur avantage comparatif, l’économie, pour laisser le leadership de la sécurité de l’Occident aux États-Unis. Néanmoins, l’Union se trouve aux périphéries de ce qui promet de constituer le grand champ de confrontation du siècle : le conflit Pacifique. Au nom de la solidarité avec les États-Unis et les valeurs démocratiques, elle ferait alors un effort de discipline au sein du bloc occidental. Défiés par des voisins rompus à l’exercice transatlantique efficace et placés aux marges de la zone la plus conflictuelle de notre époque, les Européens seraient fondés rationnellement à revenir sous la protection de l’OTAN. Il placerait alors leurs efforts internationaux dans la défense, sinon, l’affirmation géopolitique de l’Europe ne serait qu’une parenthèse. Concernant le second scénario, en 2050, l’Union aurait les moyens de peser comme puissance autonome, revendiquant ses propres objectifs, affirmant ses propres principes, défendant ses propres intérêts et assumant elle-même sa sécurité. En d’autres termes, les Européens continueront à investir dans leur propre action extérieure, ne serait-ce que parce que l’OTAN ne peut pas lutter dans tous les camps. L’urgence actuelle rend l’OTAN incontournable car incontestablement plus adaptée aux défis. Mais sur le long terme, pour la reconstruction de l’Ukraine et le rapport de force avec la Turquie, les Européens ne peuvent pas compter sur une grande réactivité ou un engagement conséquent des américains absorbés par la puissance chinoise. D’autre part, le développement de la puissance européenne pourrait prendre des formes diverses. L’intégration à terme de l’Ukraine dans l’Union nécessiterait une politique turque renforcée en mer Noire. Elle conduirait aussi rapidement l’Union à se prononcer sur l’élargissement à la Géorgie et de la Moldavie. En effet, ils positionneraient l’Union comme un acteur de zones de crise récurrentes : le Caucase, le Moyen-Orient, la mer Noire et les Balkans orientaux. En s’élargissant, l’Union se créerait des responsabilités dans des zones où les Américains n’auraient ni la capacité, ni les ressources ni la volonté de s’engager durablement. Pour le troisième scénario, une évolution possible est tracée par la création récente de la communauté politique européenne ( CPE) rassemblant 44 États d’Europe, bien au-delà des frontières de l’Union. Cette structure peut préfigurer une division du travail entre, d’un coté, une UE qui serait dédiée à l’économie, aux technologies et aux règles de droit, et, de l’autre, un forum proprement géopolitique ( la CPE), où se régleraient les différents européens en dehors des canons du droit européen à proprement parler. Les avantages de ce forum pourraient apparaître aux partisans d’une puissance européenne comme à ses adversaires.


Quand aux souverainistes, ils verraient que des avantages à un retour à l’intergouvernemental pur de la CPE. En claire, l’avenir de la puissance européenne serait marqué par la flexibilité des coalitions, la complémentarité avec l’OTAN et la réactivité par rapport aux institutions de l’UE. Le risque évident est celui de la dilution et de l’inconstance de la puissance européenne. Mais la CPE est fortement prometteuse à l’horizon 2050. Les forces internes à l'Union pousseraient à une affirmation d'une certaine forme de puissance autonome. La crise des finances publiques, la crise économique due à l'inflation énergétique notamment et la crise migratoire, relancée par la guerre en Ukraine, font peser une contrainte très forte sur les ressources européennes. Or l'acquisition d'équipement de défense américain et la contribution financière au maintien de bases américaines en Europe sont dispendieux, sans présenter de retour économique importants pour la base industrielle et technologique de défense  (BITD) en Europe. 


La rationalité budgétaire et économique de long terme plaide pour le renforcement des capacités, des productions et des entreprises européennes. Enfin, le siècle en cours pourrait être celui des Européens. Si ils s'en donnent les moyens et sortir du giron américain et surtout ne pas tomber sous la prééminence Chinoise.

MOHAMMED CHERIF BOUHOUYA








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